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Arc et Flèches

INTRODUCTION

En 1998, Gery Bonjean publiait à compte d’auteur une petite brochure intitulée ‘’L’arc simple’’. A la fin de cet ouvrage il faisait appel à tous les autres passionnés afin de concevoir un ouvrage de référence en français traitant de la fabrication des arcs primitifs. En décembre 1998 la création d’une structure sous la forme d’association régie par la loi de 1901, Emotion Primitive, nous à permis de fédérer cette idée. Vous avez donc aujourd’hui entre vos mains l’un des premiers fruits de l’association, nous comptons sur votre indulgence pour nous pardonner les défauts ou imperfections de cette première édition. Cet ouvrage est composé de quatre parties :

Les arcs simples, écrit par Gery Bonjean qui reprend l’intégralité de la deuxième édition de sa brochure, ‘’L’arc simple’’, éditée en 1998. De nombreuses petites modifications ont été apportées à son texte d’origine qui a du reste doublé de volume depuis la première édition.

Les arcs renforcés, écrit par Emmanuel Martin qui décrit avec précision la réalisation d’arcs primitifs renforcés de tendons. Emmanuel partage ses expériences : comment fabriquer la colle, comment préparer et fixer les tendons et comment mettre en forme les arcs recurves.

Les Flèches, ou Gery Bonjean décrit pour les non initiés les bases de la fabrication des flèches et leurs décorations (cresting).

Les arcs du Mary Rose, par Gery Bonjean dans lequel il nous raconte sa visite au musée de Portsmouth en Angleterre ou sont exposés de nombreux longbows anglais en if datant du seizième siècle. Ces arcs ont été récupérés, il y a quelques années, lors des fouilles et du renflouage du bateau de guerre anglais le ‘’Mary Rose’’ coulé par les Français en 1545.

A la fin de cet ouvrage vous trouverez aussi des tables de conversion bien utiles pour évaluer en métrique les fameuses unités anglo-saxonnes ainsi qu’un glossaire.

Il manque encore de nombreux chapitres dans cet ouvrage, traitant de sujet comme : les cordes, les flèches primitives, l’archéologie, les pointes de flèches, les plumes, l’arc médiévale…

En espérant que notre appel sera entendu nous vous souhaitons une bonne lecture, de bonnes heures de travaux manuels et tout le plaisir de tirer avec votre arc.

 

Il y a quelques années, je tombais sur la traduction du livre de Jim Hamm ‘L’arc indien’ en fouillant comme d’habitude le petit rayon ‘Tir à l’arc’ de la plus grande librairie de ma ville. J’ai lu et relu ce livre et petit à petit je me suis décidé à faire mon premier arc. A l’automne je suis donc parti dans les bois pour couper un frêne. Un tour à la brocante pour trouver un bon vieux rabot, et les premières flèches sont parties de mon premier arc. J’ai toujours cet arc aujourd’hui. Je me suis dit ‘’facile il ne reste plus qu’à faire mieux’’. Faire mieux ! C’est là que les problèmes commencent. J’ai donc cherché à rencontrer des amateurs ayant la même approche que moi, peine perdue, nous ne sommes pas assez nombreux. J’ai donc fouiné pour d’autres livres. Très vite je me suis aperçu que la littérature française est très pauvre sur ce sujet. Mis à part la reprise en fin du livre de Robert Roth ‘’Histoire de l’archerie’’, de sa petite brochure qui fut éditée par la FFTA en 1964, mes trouvailles se sont soldées par quelques lignes de-ci de-là. N’ayant pas trop de problème en anglais et accès à Internet, j’ai comme l’on dit ‘’surfer’’ sur le web et trouvé quelques sites, du reste principalement américains. Ces recherches m’ont permis de me documenter et d’acquérir des ouvrages spécialisés édités en Angleterre et aux USA.Le but de ce livre n’est sûrement pas de jouer au professeur ou de gagner de l’argent, il est un moyen de communication. En partageant ma passion avec vous, j’espère que ce livre vous permettra de vivre le plaisir de tirer avec un arc de votre fabrication. Je ne suis ni un chasseur, ni un compétiteur et le plaisir procuré par cette passion se situe à un autre niveau. En temps que hobby il me permet d’échapper au rythme qu’impose la vie. J’aime flâner en forêt avec mon arc tirer quelques flèches, manger des fraises des bois ou ramasser des champignons. J’aime travailler le bois dans mon atelier en faisant abstraction du temps qui passe. Et j’aime échanger avec des amis des idées, des expériences. La vie me semblerait bien morne s’il n’existait pas les passions, qui comme les utopies, permettent de faire avancer les choses.En lisant les ouvrages sur la fabrication des arcs primitifs, je me suis aperçu des nombreux points de désaccord entre les auteurs. Mon intention n’est pas de définir une nouvelle vérité mais simplement de partager mes expériences afin de vous faciliter la construction de votre arc. J’espère intimement qu’en communiquant par le livre j’aurai plus de contacts avec vous, les quelques passionnés d’aujourd’hui et de demain.Ces quelques pages traitent de l’arc simple, c’est-à-dire de l’arc fabriqué à partir d’une simple pièce de bois ou deux, raccordées à la poignée. Cette définition correspond aux arcs que nous avons faits ou que notre père nous a fabriqués en coupant une branche de noisetier au cours de promenades ou de vacances. En réalité la définition de l’arc simple est bien plus ancienne que cela. Le terme vrai serait arc primitif mais ‘’primitif’’ est parfois péjoratif. Il y a plusieurs milliers d’années, après avoir inventé la lance puis la lance à propulseur l’homme inventa l’arc. Une révolution car cet outil fut le premier à permettre d’emmagasiner l’énergie afin de la restituer par la suite. L’arc fut donc un tournant pour l’homme vers les armes modernes. En anglais l’arc simple est appelé ‘selfbow’ la traduction littérale serait ‘l’arc se suffisant à lui-même’.Un terme courant dans le milieu de l’archerie est le mot : longbow. Le ‘longbow’ ou arc long peut être un selfbow s’il est réalisé en bois massif non lamellé. Le longbow est un arc droit qui mesure environ 70 pouces (1 pouce = 2,54 centimètres). Le longbow type est l’arc anglais en if qui a causé tant de pertes aux armées françaises à Crécy, Poitiers et Azincourt.Le ‘flatbow’ ou littéralement arc plat peut aussi être un selfbow, il est généralement plus court que le longbow et se caractérise par la section de ses branches plus larges qu’épaisses. Le flatbow est par exemple l’arc des indiens d’Amérique qui, du reste, en renforçaient souvent le dos avec une couche de tendons. Ces tendons améliorent considérablement les performances des arcs indiens.De nos jours le mot longbow correspond à un arc droit composé d’un sandwich de lamelles de bois collées entre deux couches de fibre de verre. Ces nouveaux longbows sont du reste de plus en plus courts, certains ne font qu’une soixantaine de pouces. Ils possèdent aussi une fenêtre afin de laisser passer la flèche plus au centre de l’arc comme sur tous les arcs modernes.L’expression utilisée aux États Unis ‘’Primitive Archery’’ correspond à un mouvement marginal en expansion depuis les années soixante-dix, quatre-vingt. Les acteurs de cette tendance sont surtout des chasseurs lassés des techniques modernes, recherchant, une plus grande authenticité, un lien plus étroit avec la nature, un retour aux sources. Cette démarche passe par la fabrication et l’utilisation d’arcs et de flèches primitives. Primitif pour eux veut dire réaliser et utiliser un équipement ne faisant en aucun cas appel aux outils ou matériaux modernes. Leurs équipements font références aux armes des indiens et leurs arcs sont le plus souvent des flatbows. Ils sont composés de matières naturelles, animales, végétales et minérales. Ces archers chasseurs ont leur magasine :PRIMITIVE ARCHER.En Angleterre, l’autre haut lieu de tradition pour l’arc simple, la chasse à l’arc est interdite. La conservation du tir à l’arc traditionnelle est passée par la pratique de tir à la cible en utilisant les règles définies la British Long-Bow Society. Ces règles très strictes ont permis de figer l’évolution du fameux longbow anglais. Le longbow anglais se caractérise par une taille d’environ soixante-dix pouces de haut, il est en bois sans adjonction de fibre de verre avec des poupées en cornes et ne possède pas de repose flèches. Très souvent ces longbows sont composés d’un collage de deux ou trois essences de bois différentes.Ces pages ont été écrites aux quatre coins de la planète, sur mon ordinateur portable dans des chambres d’hôtel, des avions, des trains et le soir auprès de ma femme sans qui ce livre n’aurait jamais existé. Cette phrase je l’ai écrite dans une chambre à Sydney, ce qui est amusant en soi car l’Australie est un des seuls endroits où l’arc n’a pas de passé. En effet on retrouve des traces d’archerie ancienne pratiquement partout sauf en Océanie et aux Antilles. En Australie les aborigènes utilisaient des lances à propulseurs, des boomerangs mais pas d’arcs.Si ces pages traitent principalement des arcs primitifs je ne fais pas pour autant une allergie aux arcs modernes. J’ai la chance de posséder quelques beaux longbows d’artisans avec lesquels j’aime tirer.

La mécanique de l’arc

Lorsque vous regardez la tranche coupée d’un tronc ou d’une branche vous pouvez découvrir à l’extérieur l’écorce, puis sous elle, le bois composé de cernes concentriques. Les cernes extérieurs, appelés aubier, sont les plus jeunes alors que ceux du centre, les plus anciens, composent le duramen. L’aubier est plus tendre que le duramen. Dans toutes pièces de bois il est techniquement possible de réaliser un arc, mais pour faire un arc qui fonctionne durablement avec des performances raisonnables il est indispensable de comprendre comment mécaniquement il fonctionne.L’extérieur de l’arc est appelé le dos, c’est la surface qui se trouve face à la cible en position de tir. La surface faisant face au tireur est appelée ventre. Pour tous les arcs le dos travaille à l’étirement à l’inverse du ventre, qui lui, travaille à la compression. De cette constatation découle la fabrication des arcs composites, c’est l’exemple de l’utilisation des tendons, résistant très bien à l’étirement, sur le dos des arcs des indiens d’Amérique. D’autres fabricants ont utilisé l’os pour réaliser le ventre de leurs arcs, car ils résistent bien à la compression. Pour bien comprendre le phénomène des forces opposées entre dos et ventre imaginez que l’on plie l’arc jusqu’à faire toucher ensemble les deux poupées, cela formerait un cercle et la longueur du dos serait supérieure à celle du ventre, donc le ventre serait bien compressé et le dos étiré. Les forces d’étirement dans le dos de l’arc et les forces de compression dans le ventre mettent à rude épreuve le bois composant l’arc simple. Plus l’arc sera puissant plus le couple, compression, extension sera important et donc plus le choix du bois composant l’arc sera délicat. La puissance de l’arc n’est pas le seul facteur, un phénomène mécanique important influençant aussi beaucoup la durée de vie de l’arc est la flexibilité. Quand l’on arme un arc à son allonge, c’est-à-dire quand on amène la corde à son visage, il décrit un arc de cercle. Plus l’arc sera petit en taille plus la courbure réalisée en l’armant, aura un petit rayon, plus près des limites d’élasticité vous serez. Le bois n’est que du bois et l’on a tous testé ses limites élastiques en cassant une branche sur ses genoux. Le remède le plus simple afin de limiter les risques de casse et d’agrandir le rayon de courbure en agrandissant la longueur de l’arc. En d’autres mots la dimension de l’arc est un facteur primordial qui permet de limiter les efforts de déformation. A puissance et allonge égales un arc de grande taille subira de moins fortes contraintes qu’un arc court.Ce n’est pas un problème me direz-vous, faisons des arcs longs qui du reste sont plus précis que les courts. Dans certains cas un arc long ne convient pas. Les deux exemples courants sont les cavaliers et les chasseurs. Les cavaliers parce que les chevaux ont un coup et une tête gênante pour faire passer l’arc d’un côté à l’autre, utilisaient pratiquement toujours des arcs courts et donc corrigeaient leur fragilité en utilisant des arcs composites (bois, tendons, corne, os, …) ou limitaient leurs allonges en tirant des flèches courtes. Les cavaliers japonais quant à eux utilisent et utilisaient des arcs asymétriques, leurs branches inférieures étant nettement plus courtes que les supérieures. Un grand arc ne convient pas non plus aux chasseurs, difficile de se faire discret dans un bois avec pour arme un arc de deux mètres de long qui bute de partout. Les corps des trois arcs ab et c,soumis à une même allonge, ne subissent pas, de toutes évidences les mêmes déformations. Le corps de l’arc c, le plus petit, doit fléchir beaucoup plus que le b qui lui-même fléchit plus que celui du pour une même allonge. Mis à part ces problèmes de résistance à l’étirement, à la compression, de flexibilité, un autre facteur primordial intervient, c’est la nervosité des matériaux composant l’arc. En effet la vitesse d’expulsion de la flèche est proportionnelle à la rapidité avec laquelle l’arc reprendra sa forme lors de la libération de la corde. En d’autres termes non seulement le dos de l’arc doit résister à l’étirement et le ventre à la compression mais il faut aussi qu’à la libération de la corde il reprenne le plus rapidement possible sa position initiale.Sur les arcs modernes, le dos et le ventre sont recouverts de fibre de verre. Cette conception autorise un choix beaucoup plus large d’essence de bois. Malgré tout, les artisans facteurs d’arcs (longbows et recurves) utilisent pour leurs pièces de haut de gamme les mêmes bois que le fabricant de selfbow. Le bambou excepté car les techniques décrites dans ce livre ne lui sont pas adaptées. Au Bhoutan par exemple les selfbows sont réalisés en bambou. Le roi des bois d’arc, l’if est très souvent présent dans les jardins publics ou prés des églises.  

Le bois

Vu les remarques du chapitre précédent peu d’essences de bois réunissent toutes les qualités nécessaires pour fabriquer des arcs simples de qualité. L’ébéniste, dont une grande partie du métier consiste à connaître le bois, utilisera différentes essences de bois suivant des critères de résistance, d’esthétique et autres. S’il connaît bien le bois dans la pratique de son métier, il l’utilise pratiquement toujours comme une matière statique. Je veux dire qu’il ne demande pas à une table ou à une porte de résister à la flexion ou d’être élastique. Pour fabriquer un arc simple le bois a besoin d’avoir, en plus des qualités statiques, des qualités dynamiques. Le meilleur de tous les bois, pour fabriquer un arc simple, est sans aucun doute l’if. Il a la particularité de permettre la réalisation d’arcs simples possédant les avantages d’un arc composite. En effet l’aubier de couleur claire possède des caractéristiques mécaniques parfaites pour la réalisation du dos de l’arc et le duramen de couleur brun rouge est parfait pour le ventre de l’arc. De plus ses couleurs sont magnifiques et sa surface une fois polie attire la main. La mauvaise partie pour l’if est qu’il est difficile à se procurer. Les raisons de cette difficulté sont multiples. L’if est un poison pour le bétail et plus particulièrement pour les chevaux et les chèvres, donc depuis des générations les fermiers et les éleveurs les ont coupés. Les Anglais en ont acheté beaucoup en France, en Italie et en Espagne pour réaliser leurs longbows avec lesquels ils ont combattu les arbalétriers français. Le meilleur des ifs est un if qui a poussé lentement et en altitude afin d’avoir un grain fin, cet if de trente centimètres de diamètre a couramment plus d’une centaine d’années. L’if est un arbre très noueux donc il est rare de trouver les deux mètres droits et sans défaut permettant la réalisation d’un arc en une pièce. Beaucoup de longbows en if sont réalisés en deux pièces raccordées à la poignée. Il n’est pas rare de se servir des branches d’if comme matière première car les branches des gros ifs sont bien souvent d’un diamètre suffisant pour tailler un ou deux arcs. Aux USA il est possible d’acheter des chevrons d’if sélectionnés pour la fabrication d’arcs simples, ce bois vient principalement des forêts de l’Oregon. Si l’if est le meilleur de tous les bois d’arc c’est aussi le plus cher chez les marchands de bois pour archerie. En France tous les facteurs d’arcs que j’ai rencontrés conservent jalousement les quelques billes d’if qu’ils possèdent et sont très réticents à donner la moindre indication sur l’origine de leur bois. Cherchez donc par vous-même, vous n’en serez que plus heureux et plus respectueux lorsque vous trouverez votre if. L’if sur pied n’est pas un bois très cher, dans ma région le mètre cube se vend entre deux et trois mille francs. Le prix rapporté à une bûche de deux mètres le long par vingt cinq centimètres de diamètre, est d’environ deux cents francs. Si la bûche est belle vous pourrez réaliser six arcs dedans donc chaque arc vous coûtera moins de cinquante francs.L’osage est sans doute l’essence qui suit l’if dans la hiérarchie des bois d’arc, malheureusement pour nous, il ne pousse pas en Europe. Seuls les voyageurs, les débrouillards ou les fortunés sauront se procurer un chevron d’osage. L’osage est de couleur jaune et se fonce en vieillissant. L’osage était l’essence préférée des Indiens d’Amérique. Bien des facteurs d’arcs simples considèrent l’osage comme le meilleur bois. Il est possible d’acheter un chevron d’osage par correspondance aux USA, mais c’est un coup de poker si vous n’avez pas un ami sur place qui sait le choisir pour vous. L’osage, comme l’if, est un bois noueux, il n’est pas facile de trouver un chevron d’une qualité suffisante pour réaliser un arc simple, surtout si vous êtes débutant.Heureusement il y a d’autres bois bien plus faciles à trouver comme par exemple le frêne. Le frêne est intéressant car en plus d’être très commun, il est très facile à travailler. Le frêne fut très souvent utilisé pour la réalisation d’arcs et dans certaines régions de France le frêne est appelé ‘bois d’arc’. Ses bonnes qualités mécaniques ont depuis longtemps été reconnues dans d’autres domaines que celui de l’archerie comme pour la réalisation des manches d’outils ou de skis.Les techniques de fabrication d’arcs simples ne varient que très peu d’un bois à l’autre et donc je vous conseille de faire vos premiers arcs en frêne. J’écris ‘vos premiers arcs’ car je pense que comme pour moi après le premier il y aura le suivant et les autres. Parmi les essences courantes en France et compatibles à la fabrication d’arcs il y a aussi le robinier couramment appelé acacia. Le robinier est un bois lourd et dur comme le chêne alors affûtez bien vos outils. Si vous choisissez un robinier essayez d’en trouver un dans un terrain pauvre et caillouteux, car s’il pousse dans une terre riche il grandit trop vite et ses cernes de croissance seront trop épais pour permettre la réalisation d’un bon arc. J’ai vu des bûches de robinier ayant des cernes de près d’un centimètre d’épaisseur.Avant d’aller plus loin il faut que je reconnaisse mes convictions, pour moi la construction d’un arc commence dans la forêt. Bien sûr j’ai acheté quelques plateaux de frêne chez les marchands de bois et j’ai taillé des arcs dedans, les résultats ont été décevants. Je pense qu’il est indispensable de connaître son bois, c’est à dire de savoir où il a grandi, à quelle période il a été coupé, comment il a séché et tout le reste. Quand vous aurez passé plusieurs heures sur un morceau de bois et que vous le casserez dès les premiers essais, vous penserez peut être comme moi et vous voudrez tout faire pour éviter que cela ne se reproduise. Comprendre les raisons d’un échec pour en tirer une expérience est très difficile si l’on ne contrôle pas le processus du début à la fin. En un mot la construction d’un arc commence à la coupe de l’arbre.Si vous n’êtes pas un expert en bois vous trouverez ci-dessous quelques informations afin de vous aidez à identifier les arbres recherchés.

L’if

IF ou yew en anglais et taxus baccata en latin.L’if est un conifère de 10 à 15 mètres de haut pouvant atteindre un diamètre de tronc de plus d’un mètre. Le tronc est irrégulier souvent cannelé et sinueux. Son feuillage persistant composé d’aiguilles d’un à quatre centimètres est d’un beau vert foncé. Son écorce brune devient de couleur brun gris en vieillissant, formant des plaques. L’if mâle porte des petits chatons jaunes sous ses rameaux. L’if femelle porte des petits bourgeons verts. Les fruits appelés arilles en forme de petites boules rouges d’environ un centimètre de diamètre avec un cône en creux où se loge la graine sombre et dure, sont à maturité à l’automne. L’if peu gourmand en lumière se plaît dans des éboulis et à l’abri des sapins et des hêtres. D’une croissance lente surtout en altitude et sur terrain pauvre il peut atteindre des âges respectables de plus de mille ans. On trouve des ifs partout en Europe aussi bien en plaine qu’en montagne jusqu’à 1800 mètres. Le bois d’if se compose d’un aubier clair et un duramen brun rouge, il est utilisé en tournerie, marqueterie et sculpture. Il fut aussi très utilisé pour la réalisation des arcs anglais à la fin du Moyen Age. Souvent les écorces des ifs sont plus lisses que celle de celui-ci, mais pratiquement toujours des petites branches repartent du tronc........Quelques feuilles d’if avec au centre de la photo un fruit appelé arille. Cet if est donc un arbre femelle...

Le frêne

Frêne ou ash en anglais et fraxinus en latin.Ce feuillu caduque s’élève généralement à 25 mètres mais peut atteindre une quarantaine de mètres. Ses feuilles, de 20 à 30 centimètres sont composées de pennées de 9 à 13 folioles pointues de 5 à 10 centimètres de long, vertes foncées dessus et plus claires dessous. Son écorce verte et lisse sur les jeunes frênes devient gris-vert et fissurée longitudinalement en vieillissant. Les frênes aiment la lumière et fourchent le plus souvent à la suite de gelées. Le frêne se trouve pratiquement partout en Europe mis à part les extrêmes Sud et Nord. Cet arbre très courant en France vit environ 200 ans. Son bois blanc, dur et élastique est utilisé pour l’ébénisterie, la menuiserie et pour la menuiserie mécanique pour les pièces de résistances et de flexions telles que les manches d’outils. Autrefois le frêne fut utilisé pour les arcs, les javelots et les skis. Il est aussi un bon bois de chauffage donc pas de problèmes avec vos échecs, les copeaux sont parfaits pour allumer votre barbecue..L’écorce du frêne change beaucoup suivant son âge. Sur la photo de droite un jeune frêne ayant une quinzaine d’années alors que celle de gauche montre un frêne de plus de trente ans......Deux feuilles posées au sol encadrant les fruits, le frêne est un arbre facile à identifier.. .

Le robinier

Robinier couramment appelé acacia ou robinia en anglais et robinia pseudacacia en latin.Cette autre feuillu caduque s’élève jusqu’à une bonne vingtaine de mètres. Ses feuilles, de 20 à 30 centimètres sont composées de pennées de 9 à 25 petites folioles ovales de moins de 5 centimètres de long, vertes claires. Son écorce lisse et grise devient rugueuse et crevassée en prenant de l’âge. Le robinier aime la lumière et résiste bien au froid il grossit vite durant ses premières années et une vie de 300 à 400 années ne lui fait pas peur. Cet arbre fut importé d’Amérique au dix-septième et après une période de plantation il se répandit spontanément à travers toute l’Europe. Le robinier n’est pas difficile et se contente d’un sol pauvre, sol qu’il enrichit du reste grâce à ses feuilles riches en azote. Son bois jaunâtre, lourd et résistant qui fut utilisé en charronnage autrefois, est, de nos jours, surtout destiné à la fabrication de piquets.  L’écorce du robinier épaissit beaucoup avec l’âge en se crevassant. Il n’est pas rare de trouver de grosses épines sur les troncs des arbres jeunes.......Voici quelques feuilles de robinier qui pendent au gré du vent...Pour clore ce chapitre choix du bois il reste à signaler des bois exotiques tels que l’hickory, d’une bonne qualité mécanique et relativement facile à trouver chez les marchands de bois spécialisés et le lemonwood qui est utilisé en Angleterre par les fabricants de longbow traditionnels. Voici une liste des noms des essences de bois en français avec leurs traductions en anglais que j’ai établi au cours de mes lectures. Tous ces bois sont utilisés pour la fabrication d’arcs simples, mais tous ne sont pas aussi parfait que l’if. 

Nom en français

 Nom en anglais

Bambou

Bamboo

Bouleau

Birch

Cèdre

Cedar

Cerisier

Cherry

Châtaignier

Sweet chestnut

Chêne

Oak

Erable / Sycomore

Maple / Sycamore

Frêne

Ash

Genévrier

Juniper

Hickory

Hickory

If

Yew

Lemonwood

Lemonwood

Marronnier d’inde

Horse chestnut

Marronnier

Chestnut

Mûrier

Mulberry

Noyer

Walnut

Orme

Elm

Orme de montagne

Wych elm

Osage

Osage orange

Robinier / Faux acacia

Black locust

 

La coupe

Le début de la construction commence là et à partir de maintenant les erreurs vont être possibles. Sans pour autant être mystique un arbre est vivant et de plus celui que vous chercherez aura au minimum cinquante ans ce qui est un âge respectable. Le bois de qualité est rare même si vous cherchez simplement un frêne ou un robinier. Il vous faut trouver un tronc, d’un diamètre de 20 à 30 centimètres, droit avec le moins de nœuds possibles sur une longueur de deux mètres environ. Si vous trouvez plus long coupez plus long bien sûr. Dans ma région je pense qu’un frêne sur cinquante convient. Les robiniers ont un tronc naturellement plus droit, un sur vingt fera un bon bois d’arc. Pour l’if c’est beaucoup plus difficile, un sur trois ou quatre cents est plus réaliste.Attention un tronc peut sembler parfait mais il sera absolument impropre pour faire un arc si son bois est vrillé. Dans le bois il y a des fibres longitudinales, on dit qu’il est vrillé si ces fibres sont en hélice autour de son axe vertical. Un arc réalisé dans un bois vrillé aura des branches qui fléchiront latéralement en pivotant sur elles-mêmes. Cet arc sera complètement irrécupérable, je le sais j’ai fait l’expérience. La nature est bien faite car en regardant l’écorce vous pouvez neuf fois sur dix éviter ce genre de problème. Les écorces des vieux frênes et des robiniers sont fissurées et crevassées, ces reliefs sont dans l’axe du tronc pour un bois de qualité. Si ces reliefs sont inclinés vous pouvez chercher un autre arbre car il y a de fortes chances que le bois soit vrillé. La vrille sur un tronc d’if ne se voit pas à l’écorce mais à la géométrie des reliefs, en effet l’if possède rarement un tronc cylindrique mais un tronc avec des excroissances longitudinales. Si ces excroissances ne sont pas dans l’axe vertical du tronc laissez donc vivre cet arbre. Si vous ne pouvez pas aller couper votre bois et que vous utilisez un plateau ou une pièce de bois, le plus souvent vous n’aurez pas l’écorce pour vous aider. En regardant après ponçage d’un cerne extérieur vous pourrez distinguer les fibres longitudinales du bois, si elles sont dans l’axe de votre pièce de bois c’est bon, si non utilisez ce bois pour autre chose. Le bois de ce robinier ne convient pas à la fabrication d’un arc. Son écorce démontre que son bois doit être vrillé. La plupart des fabricants d’arcs simples coupent le bois à l’automne quand la sève s’arrête, leur argument est que de cette manière le bois se fend moins au séchage. Pour ma part je n’ai pas encore remarqué de grande différence entre des bois coupés à la fin de l’été et ceux coupés à l’automne. Mon problème est de trouver le temps disponible pour chercher et couper le bois, la période des vacances d’été est le bon compromis.Quand vous coupez votre arbre n’hésitez pas à couper plus long que la longueur de l’arc désiré car d’une part quand vous dessinerez l’arc sur le chevron vous pourrez peut-être éviter un nœud ou une fissure et d’autre part, il est fréquent que le bois se fende un peu sur quelques centimètres aux extrémités de la bûche.Pour clore ce chapitre parlons un peu des outils. Je ne suis pas un fanatique de la tronçonneuse, me promener dans les bois avec un bidon d’essence et supporter le bruit, gâche une bonne partie de mon plaisir. Je préfère nettement les scies et les haches. Pour le frêne et l’if une scie est suffisante, mais pour le bois dur du robinier je vous conseille malgré tout la tronçonneuse. D’autre part le bois de robinier étant très lourd si vous devez le transporter sur une grande distance je vous conseille de le refendre sur place. Même à deux une bûche de robinier de trente centimètres de diamètre sur deux mètres de long est intransportable. N’oubliez pas d’emmener aussi une bonne corde elle vous sera utile pour vous aider à faire tomber l’arbre au plus près du côté choisi. Une fois la bûche prête à être transportée je m’assure toujours de débiter les branches et la tête de l’arbre laissées sur place afin que la nature reprenne sa place au plus vite après mon passage. J’aime me promener en regardant les bois comme ici devant ce bosquet de frênes..

Le séchage

Vous avez maintenant ramené votre ou vos bûches chez vous. Si vous n’êtes pas pressé stockez les entières vous pourrez les débiter plus tard. Le stockage des billes demande tout de même quelques précautions. Il faut que les deux extrémités soit dressées. Je veux dire que si vous avez coupé votre arbre en plusieurs coups de scie, il est bon de rectifier la tranche en sciant proprement les extrémités. Une fois recoupée, passez deux couches de colle à bois (colle blanche) à vingt-quatre heures d’intervalle sur les tranches. Cette colle évitera un séchage trop rapide de la bûche qui ne manquerait pas de se fendre. La colle, tout comme un bouchon d’une bouteille laisse respirer le vin, permet au bois de sécher mais plus lentement. Stockez vos bûches dans un endroit sec, ventilé et à l’abri de la lumière direct du soleil. Placez des petites cales entre vos bûches pour permettre à l’air de circuler et attendez un minimum de trois ans si vous le pouvez. Cette méthode n’est pas la seule vous pouvez aussi débiter votre bois en chevrons immédiatement en suivant les informations ci-dessous.Pour débiter les billes en chevrons je connais deux écoles. La première est de refendre les billes à l’aide de coins et d’une masse. Cette opération est simple et a pour avantage de savoir immédiatement si le bois n’est pas vrillé. En effet en refendant la bille avec les coins, on suit automatiquement le fil du bois, si ça part en hélice vous n’avez plus de bois d’arc mais des bûches pour le feu. Une bille de bois vert se refend en partant du gros bout, la base de l’arbre. Ne faites pas l’inverse car en attaquant par le petit bout, votre bûche a toutes les chances de se refendre en biseau. L’inconvénient de cette méthode est qu’elle n’est pas bien précise et qu’elle entraîne des pertes de bois, vous vous en rendrez vite compte en refendant votre bois. Vous voulez que le bois se fende là et il se fendra comme par malice à un autre endroit. Si vous refendez une bûche déjà sèche c’est la seule solution pour savoir si le bois est vrillé pour une personne non expérimentée. Si vous refendez une bûche sèche, recherchez si elle est déjà fendue si c’est le cas et même si elles sont situées du petit côté de la bûche (cotée branches) refendez suivant ces faiblesses. La deuxième méthode est celle de la scie à ruban. Le sciage de la bille est la meilleure pour économiser le bois mais par contre vous ne saurez pas de suite si votre bois est vrillé. Il vous faudra attendre quelques mois de séchage pour le savoir. S’il est vrillé votre chevron scié prendra la forme d’une hélice au séchage, auquel cas votre bois sera déjà sec pour le feu. Pour ma part je préfère la première méthode car elle me permet de commencer à découvrir les bosses et les creux, les nœuds cachés, car le bois se fend suivant ses faiblesses contrairement à un sciage bien droit. De toute façon je n’ai pas de scie à ruban alors que j’ai deux coins et une masse. Si vous n’avez jamais refendu du bois à l’aide de coins pensez bien à acheter deux coins car l’un sert à décoincer l’autre.Refendez votre bille en deux puis encore en deux pour les billes d’un diamètre autour de vingt centimètres ou en trois ou quatre pour les plus grands diamètres. Le but est d’obtenir des chevrons triangulaires dont la surface avec l’écorce mesure entre dix et quinze centimètres de large. Bien sûr vous tenterez de dégager des chevrons sans nœuds en positionnant au mieux vos coins.Passons maintenant à l’écorçage, allez doucement sans entailler le bois car pour certaines essences comme le frêne la surface sous l’écorce peut être le dos de votre arc. Si vous coupez votre bois à la fin l’été l’écorçage est un plaisir car la sève vous permet de détacher l’écorce à la main sans effort. Vous n’êtes pas obligé d’écorcer vos chevrons, par exemple j’ai écorcé des chevrons de robinier, pourtant coupés à l’automne et j’ai obtenu de profondes fissures dans l’aubier après juste deux mois de séchage. Heureusement ces fissures se sont arrêtées dans l’aubier que l’on doit retirer pour faire un arc en robinier. Maintenant, à l’aide d’un rabot, enlevez les trois coins de votre chevron afin de réduire les masses à sécher car ils n’ont aucune utilité. Ne cherchez pas à réaliser un chevron parfait, il n’existe pas.:Sur un dessin tout est parfait et tout paraît simple. Premièrement la bille est refendue en deux puis encore en deux ou trois en fonction de son diamètre extérieur.:::::Du refend, à l’aide d’un rabot, on tirera le chevron à faire sécher. Trop gros il sera long à sécher, trop petit il limitera le choix de l’arc à réaliser.:Conservez le maximum de matière afin d’avoir ensuite plus de choix pour réaliser votre arc. Une fois coupé c’est trop tard, pas moyen de corriger une erreur. A la fin de cette phase vous obtiendrez des chevrons de sections proches du carré. Ils auront une section entre cinq par cinq et dix par dix centimètres sur plus ou moins deux mètres de long. Reste maintenant à les stocker à l’ombre dans un endroit frais et ventilé, mettez des petites cales entre eux pour permettre à l’air de circuler autour. Je passe toujours deux couches de colle à bois (colle blanche) à 24 heures d’intervalle sur les bouts des chevrons car sans cela ils se fendent. D’autres utilisent de la peinture, pour moi la colle blanche fonctionne bien donc je n’ai pas de raison de tester d’autres solutions. Combien de temps de séchage ? Bonne question, Il est sûr que laisser sécher un chevron est moins long qu’une bûche entière. Certains disent minimum trois ans. J’imagine votre impatience, trois ans c’est long rassurez-vous d’autres et pas des moindres comme Ishi (voire bibliographie ‘Ishi’) construisent des arcs quelques jours ou semaines après avoir coupé l’arbre. J’ai taillé mon premier arc dans un frêne coupé depuis seulement deux mois et plusieurs années après il n’a pas pris une ride et fait toujours ses trente huit livres à vingt huit pouces avec un suivi de corde d’un pouce. Le suivi de corde, en anglais ‘string follow’, est la distance qui sépare la poignée côté ventre de la ligne droite fictive qui passe par les deux poupées, l’arc étant débandé. En d’autres mots quand vous débandez votre arc il garde une courbure. Certains fabricants affirment qu’un arc en bois vert a plus de suivi de corde qu’un bois sec, techniquement je les crois, mais pratiquement je n’ai pas fait l’expérience pour tous les bois. Avec l’if c’est sûr il faut attendre.En résumé, si vous avez coupé un super if, prenez votre temps et laissez-le sécher trois ans, et en attendant faites-vous la main avec des bois plus communs. Si vous avez coupé plusieurs bûches faites comme moi et testez en même temps plusieurs méthodes. Par exemple refendez une partie de votre bois et conservez l’autre partie en bûches entières. Certain bois comme celui du robinier se refend beaucoup mieux quand il est frais.Le véritable problème de la fabrication des arcs simples est d’avoir du bois de qualité bien sec. Pensez si c’est votre première expérience qu’il vous faut vous constituer un stock de bois. Pour ma part je note pour mes bûches et mes chevrons les dates de coupe des arbres. Là encore il y a un parallèle à faire avec le vin. Une bonne bouteille sera conservée plus longtemps que celle de vins courants et ne sera ouverte qu’à une grande occasion. Commencez par acquérir votre expérience avec des bois courants et gardez vos meilleures pièces pour plus tard.::Trois chevrons d’if à gauche puis trois chevrons de robinier. J’ai mis deux ans à trouver ces magnifiques bois d’if de 2 mètres de long sans nœud.:::

Les outils

En fait, si vous êtes un puriste, une ou deux pierres taillées et vous avez les outils qu’utilisaient nos ancêtres et avec lesquels ils ont construit des milliers d’arcs. Plus proches de nous il y a tous les outils à bois qu’utilisaient nos grands-parents. Et maintenant il y a tous les outils du bricoleur contemporain, qui font du bruit, qui ont besoin d’électricité, mais qui sont diablement efficaces. Comme ils sont rapides les erreurs arrivent aussi beaucoup plus vite. Pour ma part j’aime beaucoup les outils de nos grands-pères, rabots en bois, planes, ciseaux. Je les recherche dans les brocantes et les sauve d’une destinée d’objets décoratifs. J’utilise aussi une ponceuse à bande et une raboteuse portative. L’outillage minimum pour la réalisation d’un arc simple se compose :üD’un mètreüD’une scie égoïneüD’un rabotüD’une planeüD’une ou deux râpes à boisüD’une pierre à huileüDe papiers de verre fin et très finüD’une cale pour le ‘tillering’ (à fabriquer)Auquel vous pouvez ajouter :üUn racloir ou un couteau de chasseüDes pailles de fer, fine et très fineüUne lime queue de rat (d=2 ou 3 mm)üUn peson pour arc ou un pèse-personnesüUn mètre en pouces évitant ainsi les calculs Un ou deux rabots, une ou deux planes, un couteau de chasse, une lime et un mètre voici l’ensemble des outils permettant la réalisation d’un arc.:Le seul outil que vous ne trouverez pas dans le commerce est la cale de ‘tillering’. Le tillering est l’opération qui consiste à équilibrer les branches de l’arc. Tillering serait traduit par réglage ou équilibrage en français. La cale pour le tillering est une barre de bois se calant à l’intérieur de la poignée d’arc et permettant de retenir la corde à différentes allonges afin de contrôler la forme et la symétrie des branches de l’arc. A ces outils vous pouvez rajouter si vous voulez vivre avec votre temps une ponceuse à bande qui est l’outil indispensable de tous fabricants d’arc cherchant à gagner de la productivité. La réalisation de la cale pour le tillering est très simple il vous faudra un morceau de bois d’un pouce par un pouce et d’environ 35 pouces de long. Veuillez vous référer au schéma suivant pour la réalisation de votre cale de tillering. Cet outil spécifique à la fabrication d’arcs est introuvable dans le commerce vu sa simplicité et le peu de clients susceptibles de l’utiliser.: La barre ou cale de tillering est utilisée lors de l’équilibrage des branches de l’arc pour retenir la corde à différentes allonges.:Mis à part la cale pour le tillering tout cet équipement est facile à trouver ou fait déjà partie de votre outillage, donc pas de gros investissement. Le peson est un dynamomètre à ressort servant à mesurer la force de l’arc. Si vous ne possédez pas de peson un simple pèse-personnes fera l’affaire mais dans ce cas vous aurez à convertir des kilos en livres.Dans la liste il y a un mètre et un mètre en pouce. Ce n’est malheureusement pas une erreur les unités standards de l’archerie sont :Le pouce (ou inch en anglais) pour unité de longueur.ü1 pouce est égal à 25,4 millimètres.La livre (ou pound en anglais) pour unité de force.ü1 livre est égale à 454 grammes.Le grain pour unité de poids de flèche.ü1 grain est égal à 0,0648 grammes.Il est vain de vouloir traduire toutes les cotes en décimal car, par exemple, quand vous voudrez acheter des flèches, tous les abaques sont en mesures anglo-saxonnes. De même pour les cordes on vous demandera la longueur de l’arc en pouces ainsi que sa force en livres à votre allonge en pouces. Pour la construction de votre arc travaillez directement en pouces et pour les mesures de force vous n’avez pas le choix en archerie c’est ‘pound’ ou livre en français. Donc pour les mesures trouvez un mètre roulant en pouces ou fabriquez le, pour un arc simple les mesures ne sont pas trop précises.Alors, si l’on utilise le pouce comment ça marche ? La seule solution pour utiliser un autre système de mesure est de ne plus faire référence par table de conversion au système métrique car tout devient alors compliqué avec des virgules à n’en plus finir. Est-ce que lire l’heure sur votre montre vous pose problème ? Je pense que non. Mais les problèmes arrivent quand on veut calculer combien de temps il reste sur une K7 vidéo de 3 heures alors que l’on a déjà enregistré un film de 95 minutes et que l’on à besoin d’1 heure et 40 minutes pour un autre. Il en est de même pour les pouces tout va bien lorsqu’il n’y a pas d’opérations.Un pouce est la mesure de base pour l’archerie. Les longueurs des flèches et des arcs sont en pouces. Plus grand que le pouce c’est le pied qui est égal à 12 pouces. Le pied ou foot en anglais est très peu utilisé dans l’archerie. Plus petit que le pouce ça se complique. La base est 2, on divise par deux pour obtenir plus petit. Donc on a le 1/2 pouce, 1/4, 1/8, 1/16, 1/32 et le 1/64. Pour la fabrication d’un arc le 1/8 est suffisant. Donc pour réaliser notre règle en pouces il suffit de savoir que le pouce est égal à 25,4 millimètres pour dessiner sur le bord d’une feuille ou graver sur un morceau de bois une dizaine de graduations espacées de 25,4 millimètres, puis tracer les milieux, les quarts et les huitièmes entre chaque graduation. C’est sûr, c’est moins immédiat que le système métrique mais ça n’a pas empêché les Américains de marcher sur la lune. Les fanatiques du système métrique trouveront une table de conversion à la fin de l’ouvrage. Il est aussi possible de trouver des mètres rubans ayant une double graduation pouces/centimètres. Pour la petite histoire ça devient rigolo quand les Américains ont voulu faire de la précision, ils ont inventé une mesure bâtarde en introduisant un peu de système décimal dans leur bazar. Ils ont créé le millième et le centième de pouce. Ces fractions décimales de pouce sont utilisées en archerie pour mesurer l’épaisseur des plaques de fibre de verre des arcs modernes.Avant de passer au chapitre suivant un petit mot sur la plane. C’est un outil coupant comme le rabot mais sa lame a le défaut de ne posséder aucune protection. La lame de la plane s’affûte avec une pierre à huile, elle doit être aussi coupante qu’un rasoir. Une plane mal affûtée, au lieu de couper, suivra les fibres du bois un peu comme un coin dans une bûche. Si des enfants fréquentent votre atelier considérez la plane comme un outil dangereux. Le tronc d’un if plusieurs fois centenaire d’un diamètre de plus de 80 centimètres est un magnifique support pour un longbow de 70 pouces. 

Les différents types d’arcs simples

Vous avez devant vous un chevron, il vous reste maintenant à chercher l’arc que vous allez révéler en lui. L’arc le plus simple à réaliser est le longbow anglais. Regardez votre chevron, si sa largeur est de moins d’un pouce et demi, sa longueur de plus de soixante-dix pouces et sans gros défaut, vous pouvez faire un longbow anglais. Si votre chevron est plus large vous pouvez faire un flatbow. Vous trouverez dans les pages suivantes des plans d’arcs, mais jamais personne ne vous dira : respectez ces cotes pour obtenir un arc de telle force à telle allonge.

Le bois est une matière vivante donc capricieuse. S’il est vivant cela veut dire qu’il vit et qu’il meurt. Rassurez-vous, des archéologues anglais ont renfloué au début des années 1980 l’épave d’un navire de guerre, le Mary Rose, coulé en 1545 à l’entrée du port de Portsmouth par une douzaine de mètres de fond, contenant des longbows en if. Ils ont fait sécher les arcs et ont pu tirer quelques flèches avec (voir chapitre ‘’les arcs du Mary Rose’’). Vivant veut dire que le bois réagit et n’obéit pas forcément à des tables et des abaques.

Si l’on faisait des arcs dans du plastique ou dans du métal il serait possible de vous donner des cotes précises. Toute la magie vient de là, c’est cela qui fait de votre arc une pièce unique. Toutes les cotes que vous trouverez dans les schémas suivants ne sont donc données qu’à titre indicatif.

Concernant les longbows anglais il y a une cote que l’on peut connaître c’est sa longueur. La longueur optimale d’un longbow est en fonction de l’allonge du tireur. L’allonge est égale à la distance entre le dos de l’arc et le point d’ancrage de la corde (à l’endroit où la flèche est encochée) sur le visage du tireur, arc armé.

Pour une allonge de 26 pouces la longueur du longbow sera de 66 à 68 pouces.

Pour une allonge de 28 pouces la longueur du longbow sera entre 68 et 70 pouces.

Pour une allonge de 29 à 30 pouces la longueur du longbow sera entre 72 et 74 pouces.

D’une manière générale un arc long est plus précis et accepte mieux les erreurs de décoche qu’un arc court. Par contre un arc court est plus rapide à force égale. Un tireur à la cible choisira un arc long alors qu’un chasseur préférera un arc court, rapide et maniable. Les flatbows sont généralement plus courts que les longbows. Personnellement et en référence au chapitre ‘La mécanique de l’arc’. Je pense qu’il est difficile pour un arc simple d’une puissance d’une cinquantaine de livres à une allonge de vingt-huit pouces de mesurer moins de soixante-deux pouces. Jim Hamm donne dans sont livre une formule empirique, confirmée par d’autres auteurs, pour les arcs simples du type flatbow.

La longueur du flatbow doit être égale à deux fois l’allonge plus de dix à vingt pour-cent. Ce qui donne :

Pour une allonge de 26 pouces la longueur du flatbow sera entre 57 et 62 pouces.

Pour une allonge de 28 pouces la longueur du flatbow sera entre 62 et 66 pouces.

Pour une allonge de 30 pouces la longueur du flatbow sera entre 66 et 72 pouces.

En résumé si vous fabriquez votre premier arc, faites le grand, vous aurez plus de chance de succès.

Plan de longbow anglais

 

Plan de flatbow asymétrique

Plan 1 de flatbow symétrique

 

Plan 2 de flatbow symétrique

 

 

De gauche à droite : Longbow en hickory de 70 pouces, flatbow en frêne de 70 pouces, longbow de mon fils en frêne de 54 pouces, flatbow indien en frêne de 52 pouces et la première réalisation un flatbow en frêne de 64 pouces.

 

Le dos de l’arc

Dans la réalisation d’un arc, les deux phases les plus délicates sont le dressage du dos et le tillering. Le dos de l’arc est soumis à des forces d’étirement qui sont à l’origine de la plupart de mes échecs. Pour bien résister, le dos de l’arc doit être entièrement réalisé dans le même cerne du bois. Bien sûr il y a des exceptions ; il existe des fabricants qui ne respectent pas cette règle comme l’Américain Tim Baker. Tim Baker est un fabricant d’arcs simples qui organise des stages de fabrication d’arc simple. Sa spécialité est de faire des arcs dans des chevrons de toutes sortes de bois achetés dans les scieries et autres magasins de bricolage. Un flatbow célèbre en orme, découvert dans la tourbière d’Holmengaard en 1944 au Danemark attribué au mésolithique entre 7500 et 8000 ans avant Jésus Christ, ne fut pas construit le dos dans un même cerne. Si vous voulez que votre premier arc soit un succès suivez scrupuleusement la même veine du bois pour en réaliser le dos. Je ne vous apprendrai rien en vous disant que chaque année l’arbre ajoute une couche appelée cerne annuel à l’extérieur, sous l’écorce. Toute la surface du dos de l’arc, étant réalisée dans le même cerne, datera donc de la même année.

Le dressage du dos d’un chevron de frêne est aisé car ses cernes sont composés de couches claires et dures séparées par des couches tendres et brunes. La lame de votre rabot ou de votre plane suivra presque naturellement la couche brune. Pour d’autres essences comme l’hickory, le robinier ou l’if c’est un peu plus difficile car la couche brune de séparation entre les cernes n’est pas facilement visible et n’est pas vraiment plus tendre. Le robinier avec sa dureté proche de celle du chêne n’est pas des plus faciles à ramener au même cerne. Pour l’if le problème est la présence de l’aubier clair dont le dos de l’arc sera composé. Il vous faudra conserver une couche d’aubier entre un 1/4 et 1/8 de pouce, ce qui en cas d’erreur ne permet pas de descendre d’un cerne de plus car il ne resterait plus assez d’aubier. Pour le frêne qui n’a pas d’aubier visible, si vous faites un trou dans le cerne c’est juste reparti pour un tour. Souvent avec le frêne vous pouvez vous passer de cette opération et conserver le premier cerne d’aubier si lors de l’écorçage vous ne l’avez pas détérioré et voilà pourquoi c’est un bon choix pour votre premier arc.

Un autre facteur de difficulté réside en l’épaisseur des cernes. Plus les cernes sont fins, moins il faut de temps pour faire une erreur. Les bois à grain fin, c’est à dire qui ont poussé lentement, sont les plus recherchés par les facteurs d’arcs. C’est tout spécialement le cas de l’if. J’ai l’exemple dans mon atelier de deux billes d’if, de même diamètre l’une a soixante ans et l’autre dépasse les cent années. Je n’ai encore pas assez d’expérience pour pouvoir mesurer l’influence de la finesse du grain sur les performances de l’arc. Cette expérience prend du temps il m’a fallu plus de deux ans pour trouver les ifs et il en faut trois pour qu’ils sèchent.

Pour cette opération j’utilise le petit rabot et un couteau de chasse comme racloir pour le frêne. L’utilisation d’une plane, qui est l’outil type pour ce travail est beaucoup plus pratique et donne de bien meilleurs résultats pour les bois durs comme le robinier ou tendres et homogènes comme l’if. A vous de trouver l’outil qui vous convient le mieux. J’ai vu des photos où l’opérateur utilisait une hachette. Si sur le dos de l’arc vous avez une entaille même peu profonde éliminez-la à l’aide d’un racloir ou de papier de verre si vous n’y parvenez pas vous connaissez déjà l’endroit où votre arc va casser, alors descendez d’un cerne, et plus doucement cette fois. Pour les nœuds suivez toujours le même cerne du bois ce qui vous fera découvrir les bosses qui donneront du caractère et de la personnalité à votre arc. Une bonne solution est de laisser un ou deux cernes d’épaisseur sur les nœuds et de revenir dessus plus tard, une fois que tout le chevron est au même cerne. Si vous voulez un arc parfaitement droit allez au magasin le plus proche, ils ont des arcs industriels parfaitement droits. Une fois cette opération terminée vous allez pouvoir dessiner le contour de l’arc sur ce dos. Vous allez maintenant apprécier les surplus de matière en calant votre arc entre les nœuds et les imperfections du bois. Si le dos ainsi dressé présente des défauts, du style grosse bosse, ne vous inquiétez pas, une fois l’arc pratiquement terminé vous pourrez les corriger en chauffant le bois.

Le dos de l’arc

Dans la réalisation d’un arc, les deux phases les plus délicates sont le dressage du dos et le tillering. Le dos de l’arc est soumis à des forces d’étirement qui sont à l’origine de la plupart de mes échecs. Pour bien résister, le dos de l’arc doit être entièrement réalisé dans le même cerne du bois. Bien sûr il y a des exceptions ; il existe des fabricants qui ne respectent pas cette règle comme l’Américain Tim Baker. Tim Baker est un fabricant d’arcs simples qui organise des stages de fabrication d’arc simple. Sa spécialité est de faire des arcs dans des chevrons de toutes sortes de bois achetés dans les scieries et autres magasins de bricolage. Un flatbow célèbre en orme, découvert dans la tourbière d’Holmengaard en 1944 au Danemark attribué au mésolithique entre 7500 et 8000 ans avant Jésus Christ, ne fut pas construit le dos dans un même cerne. Si vous voulez que votre premier arc soit un succès suivez scrupuleusement la même veine du bois pour en réaliser le dos. Je ne vous apprendrai rien en vous disant que chaque année l’arbre ajoute une couche appelée cerne annuel à l’extérieur, sous l’écorce. Toute la surface du dos de l’arc, étant réalisée dans le même cerne, datera donc de la même année.

Le dressage du dos d’un chevron de frêne est aisé car ses cernes sont composés de couches claires et dures séparées par des couches tendres et brunes. La lame de votre rabot ou de votre plane suivra presque naturellement la couche brune. Pour d’autres essences comme l’hickory, le robinier ou l’if c’est un peu plus difficile car la couche brune de séparation entre les cernes n’est pas facilement visible et n’est pas vraiment plus tendre. Le robinier avec sa dureté proche de celle du chêne n’est pas des plus faciles à ramener au même cerne. Pour l’if le problème est la présence de l’aubier clair dont le dos de l’arc sera composé. Il vous faudra conserver une couche d’aubier entre un 1/4 et 1/8 de pouce, ce qui en cas d’erreur ne permet pas de descendre d’un cerne de plus car il ne resterait plus assez d’aubier. Pour le frêne qui n’a pas d’aubier visible, si vous faites un trou dans le cerne c’est juste reparti pour un tour. Souvent avec le frêne vous pouvez vous passer de cette opération et conserver le premier cerne d’aubier si lors de l’écorçage vous ne l’avez pas détérioré et voilà pourquoi c’est un bon choix pour votre premier arc.

Un autre facteur de difficulté réside en l’épaisseur des cernes. Plus les cernes sont fins, moins il faut de temps pour faire une erreur. Les bois à grain fin, c’est à dire qui ont poussé lentement, sont les plus recherchés par les facteurs d’arcs. C’est tout spécialement le cas de l’if. J’ai l’exemple dans mon atelier de deux billes d’if, de même diamètre l’une a soixante ans et l’autre dépasse les cent années. Je n’ai encore pas assez d’expérience pour pouvoir mesurer l’influence de la finesse du grain sur les performances de l’arc. Cette expérience prend du temps il m’a fallu plus de deux ans pour trouver les ifs et il en faut trois pour qu’ils sèchent.

Pour cette opération j’utilise le petit rabot et un couteau de chasse comme racloir pour le frêne. L’utilisation d’une plane, qui est l’outil type pour ce travail est beaucoup plus pratique et donne de bien meilleurs résultats pour les bois durs comme le robinier ou tendres et homogènes comme l’if. A vous de trouver l’outil qui vous convient le mieux. J’ai vu des photos où l’opérateur utilisait une hachette. Si sur le dos de l’arc vous avez une entaille même peu profonde éliminez-la à l’aide d’un racloir ou de papier de verre si vous n’y parvenez pas vous connaissez déjà l’endroit où votre arc va casser, alors descendez d’un cerne, et plus doucement cette fois. Pour les nœuds suivez toujours le même cerne du bois ce qui vous fera découvrir les bosses qui donneront du caractère et de la personnalité à votre arc. Une bonne solution est de laisser un ou deux cernes d’épaisseur sur les nœuds et de revenir dessus plus tard, une fois que tout le chevron est au même cerne. Si vous voulez un arc parfaitement droit allez au magasin le plus proche, ils ont des arcs industriels parfaitement droits. Une fois cette opération terminée vous allez pouvoir dessiner le contour de l’arc sur ce dos. Vous allez maintenant apprécier les surplus de matière en calant votre arc entre les nœuds et les imperfections du bois. Si le dos ainsi dressé présente des défauts, du style grosse bosse, ne vous inquiétez pas, une fois l’arc pratiquement terminé vous pourrez les corriger en chauffant le bois.

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Retirer deux ou trois cernes sur toute la longueur du chevron est une opération délicate. Le dos de l’arc doit être dans le même cerne.

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Dans le cas ou vous n’avez pas une longueur de chevron suffisante vous aurez à le réaliser en deux parties. Choisissez bien vos deux pièces de bois pour qu’elles aient les mêmes caractéristiques. Je vous conseille de choisir deux morceaux qui était côte à côte dans la bûche. Enlever rigoureusement le même nombre de cernes sur chacun des morceaux. Ceci est tout particulièrement vrai pour l’if car chaque pièce devra absolument avoir la même couche d’obier.

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Coupe d’un if d’environ soixante-dix ans. L’aubier clair en haut de la photo surmonte duramen plus sombre.

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Ici la tranche d’une branche d’arc fini en if. Quelques millimètres d’aubier restent sur le dos de l’arc. A la poignée de cet arc j’ai compté plus de trente cernes.

 

 

La naissance de l’arc

Vous avez devant vous, soit un chevron plus long que l’arc que vous voulez réaliser, soit deux demi-chevrons provenant d’un même arbre ou, d’arbres de mêmes caractéristiques. Dans le cas des deux demi-chevrons vous allez devoir les assembler avant de passer à l’étape suivante.

La réalisation des longbows de type anglais en deux parties est relativement courante, par contre cette technique est plus rare pour les flatbows. Je prendrai donc l’exemple d’un longbow de type anglais pour décrire l’assemblage des demi-chevrons. Il vous faut tout d’abord connaître la largeur de la poignée que votre arc aura, une fois fini, en général entre un pouce et un pouce un quart. Sur chacune des pièces de bois vous allez tracer l’axe de votre arc sur son dos ainsi que deux lignes parallèles définissant la largeur maximum de l’arc fini. Si l’un des deux chevrons est plus long que l’autre ne le coupez pas car la poignée de l’arc ne sera pas centrée. Vous allez tracer sur la seule partie pratiquement finie de l’arc, son dos, alors n’appuyez pas trop fort et utilisez un crayon papier gras. Avant de tracer regardez bien vos demi-chevrons, et tentez d’exclure les nœuds et les imperfections du bois. Le bois d’if a en plus de tous les défauts communs aux autres bois d’arc des inclusions de résines, ces inclusions ne peuvent en aucun cas être contenues dans l’arc.

Le traçage du centre de l’arc et de ses limites externes doit être réalisé avec soin en évitant au maximum les défauts du bois que sont les nœuds et les poches de résines.

 

Faites attention à l’orientation du bois, la partie qui était la plus près des racines de l’arbre sera celle qui devra se retrouver dans la poignée. Si vous ne vous souvenez plus de l’orientation de vos chevrons sachez que le bois est bien souvent plus lisse au toucher lorsque vous déplacez vos doigts dans le sens du bois c’est à dire de la base de l’arbre vers ses branches. Si vous ne sentez pas de différence au toucher, avec le rabot vous la verrez car il accroche quand vous êtes à contresens, laissant derrière lui une surface moins nette que lorsque vous êtes dans le fil. Cet effet sera d’autant plus marqué si votre rabot n’est pas parfaitement affûté. Pensez cette fois à repérer le sens du bois par exemple avec une croix. Une fois ce traçage réalisé éliminez le bois en dehors du tracé, en laissant une petite couche de deux ou trois millimètres.

Repérer le sens du bois est indispensable avant de réaliser l’assemblage des deux branches de l’arc.

 

Tracez alors la découpe de l’assemblage de la poignée. La littérature spécialisée décrit trois types d’assemblages, mon expérience dans ce domaine étant restreinte choisissez et tracez votre assemblage sur les deux branches.

Le découpage de ces assemblages est relativement aisé si vous disposez d’une scie à ruban et bien qu’il soit possible de le réaliser avec une scie égoïne je vous conseille si vous n’êtes pas un bon bricoleur d’aller rendre visite à l’ébéniste le plus proche. Contrôlez bien une fois la découpe réalisée que les deux axes tracés précédemment et les deux dos des branches soient proprement alignés.

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Dans la littérature anglo-saxonne trois types d’assemblages des branches sont décrits. La réalisation de ces assemblages n’est pas simple et doit être soignée afin d’assurer une bonne solidité du longbow.

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Dans cet assemblage les deux branches seront alignées, c’est à dire que le dos de l’arc sera plat.

Si vous êtes un expert en assemblage vous pouvez prévoir de donner une légère précontrainte à votre arc en créant un léger angle entre vos deux branches. Le dos deviendra alors concave au lieu de plat.

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Dans cet assemblage, les deux branches seront alignées suivant un léger angle, c’est à dire que le dos de l’arc sera légèrement concave.

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Une fois la découpe réalisée, collez les deux branches ensemble avec une colle moderne de type ‘’Araldite’’ puis à l’aide de serre-joints immobilisez le tout sous pression. Certains fabricants renforcent leurs assemblages par deux chevilles comme dans le schéma suivant. Il est préférable d’utiliser des chevilles taillées dans le même bois que votre arc. Si vous chevillez, attention à la position, pensez que les chevilles doivent se retrouver au milieu de l’épaisseur de la poignée une fois l’arc fini et non au milieu des chevrons. Laissez prendre votre collage pendant une nuit complète dans un local pas trop froid. Le lendemain éliminez les surplus de colle à l’aide d’un grattoir ou d’un couteau et arasez les chevilles.

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L’assemblage des deux branches sera renforcé par deux petites chevilles de bois de même essence. Pensez à bien positionner les chevilles qui seront centrées dans la poignée finie de l’arc et non pas centrées dans le chevron.

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Assemblage des deux branches en frêne renforcé par deux petites chevilles de bois. Réalisation et photo : Emmanuel Martin.

Pour un chevron d’un seul tenant tracez sur le dos du chevron l’axe longitudinal de l’arc. Maintenant que vous utilisiez un chevron en une partie ou en deux assemblées le travail sera le même. Tracez le contour final de l’arc suivant le plan du modèle que vous avez choisi (voir chapitre : Les différents types d’arc). Il est temps de définir le haut et le bas de votre arc et de tracer le milieu de l’arc dans le sens de la hauteur.

Si vous avez regardé attentivement les plans vous avez du vous rendre compte que les arcs peuvent d’être soit à branches symétriques soit à branches asymétriques. Personnellement et comme la plus part des facteurs d’arc je construis mes longbows à branches asymétriques et mes flatbows à branches symétriques. Pour ces arcs asymétriques le centre géométrique de l’arc dans le sens de la hauteur, c’est à dire le milieu de la distance entre les deux poupées, ne correspond pas au centre de la poignée de l’arc. La flèche par contre et pour tous types d’arcs simples passera un pouce au-dessus du centre géométrique. Sur un arc asymétrique si vous avez une poignée de quatre pouces de long, un pouce de celle-ci sera en dessus du milieu géométrique et trois pouces en dessous. La branche inférieure de l’arc sera donc plus courte que la branche supérieure. Ceci est particulièrement fréquent pour les longbows.

Si votre arc est en deux parties assemblées vous centrerez le raccord sous la poignée afin de le rendre invisible sous une poignée en cuir lors de la finition. Branches symétriques ou asymétriques seront de toute façon équilibrées lors du tillering en fonction du point d’appui de la main tenant l’arc et de la position de la main sur la corde. Tout ceci doit vous sembler compliqué donc un petit schéma est mieux qu’un grand discours.

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Le centre de l’arc se trouve au milieu de la distance entre les gorges des poupées retenant la corde. Le passage de la flèche sera un pouce en dessus de celui-ci. Le longbow ci-dessus et à branches asymétriques alors que le flatbow en dessous est à branches symétriques.

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Les longbows anglais sont ambidextres et les flatbows de droitier et de gaucher ne présentent qu’une petite différence de finition, le repose flèche qui du reste n’est pas indispensable. Une fois le traçage complet réalisé, enlevez le bois en dehors du tracé. A cette étape on conservera l’épaisseur de l’arc, on se contentera d’éliminer le bois sur les côtés de l’arc. Le rabot est l’outil type pour cette phase. Si l’épaisseur de votre chevron qui sera bientôt l’épaisseur de l’arc est, de trop, supérieure à celle de la poignée n’hésitez pas à éliminer ceci facilitera votre travail sur les champs. Ne cherchez pas à finir les champs de l’arc et à casser les angles, cette finition sera pour plus tard. En laissant une légère couche de bois sur les champs de l’arc vous gardez plus de chance pour des corrections futures. Vous pouvez maintenant mettre à longueur cette ébauche. Coupez au minimum un pouce après les coches de chaque poupée. Si vous voulez par exemple un arc de 68 pouces votre arc hors tout fera un minimum de 70 pouces.

Votre ébauche ressemble déjà beaucoup plus à un arc. Tracez l’épaisseur de l’arc maintenant. Ce traçage n’est pas simple car sur le papier tout est droit mais sur votre chevron il y a les nœuds, les déformations. Ce traçage pour un longbow consiste à tracer une ligne oblique par rapport à une ligne droite. Malheureusement la ligne du dos de l’arc n’est pas une ligne droite ou si elle l’est, vous avez dans vos mains une pièce de bois exceptionnelle. Pour ce traçage vous allez être obligé de marquer l’épaisseur à différents points des branches. Le nombre de points dépendra surtout de la rectitude de votre chevron. Réalisez ce traçage sur les deux champs de l’arc. Pour les flatbows c’est relativement plus facile car le dos et le ventre des branches seront pratiquement parallèles.

Eliminez tout le bois en dehors du tracé en commençant par la poignée. Les branches d’un longbow sont bien plus faciles à réaliser que celles d’un flatbow car de la poignée à la pointe de la poupée la surface est plane et donc quelques passages de rabot et le travail est fini. Pour un flatbow la partie entre la poignée et la branche, étant concave, sera réalisée à l’aide d’une râpe ou d’une plane et de papier de verre. Il est vrai que pour cette étape une ponceuse à bande électrique est l’outil rêvé et évite pasmal de sueur. Finissez maintenant les champs des branches en enlevant la sur épaisseur que vous aviez laissée précédemment. Une fois ce travail fini vous avez une bonne ébauche et si vous avez respecté l’un des plans donnés et suivant votre sélection de bois, vous vous retrouvez avec l’ébauche d’un arc d’une force de cinquante à cent livres.

Vous allez avoir à vous servir d’un peson en livre (pound en anglais). Si vous n’en avez pas et si vous avez un pèse-personne ne courez pas en acheter un. Préparez juste un chevron ou un manche à balai d’environ un mètre de long, un trait de scie à une extrémité de deux à trois millimètres de large puis à partir du fond de cette gorge tracez un repère tous les pouces entre dix et trente pouces. L’utilisation de ce système de pesage est des plus simple. Posez votre pèse-personne au sol, la barre préparée sera positionnée debout au centre du plateau, la partie précédemment taillée en haut. Placez le centre de la corde dans l’encoche de votre barre et des deux mains sur l’arc amenez la poignée, en poussant vers le bas, au repère sur la barre de l’allonge désirée. Une fois l’allonge atteinte le poids est indiqué sur la balance. Ici encore un schéma est bien plus efficace que ces quelques lignes. Attention il arrive que la barre ripe de la balance, appuyez bien dans l’axe ou fixez la barre sur le plateau.

Si vous utilisez un pèse-personne il sera vraisemblablement en kilogrammes donc vous serez obligé de faire des tas de conversions kilogrammes / livres. Vous trouverez en fin de livre deux tables de conversion une de kilogrammes en livres et l’autre de livres en kilogrammes. Ces tables vous éviteront bien des règles de trois.

 

Une simple barre de bois et un pèse-personne vous permettront de remplacer un peson. La corde calée au sommet de la barre, amenez le corps de l’arc à l’allonge désirée. La force de l’arc à l’allonge est inscrite sur la balance.

Maintenant vous allez travailler sur le ventre de l’arc afin d’abaisser sa puissance au plus près de vos désirs. Pour dégrossir ce travail je vous déconseille la réalisation immédiate des encoches dans les branches. Réalisez simplement à l’aide de fil de fer deux petits supports ou deux petites poches de cuir à la manière des fausses cordes pour longbow, permettant de fixer une corde. Ce substitut d’encoche est très simple à réaliser et permet une première approche sans détérioration du bois de l’arc.

Montez ces attaches sur les poupées de l’arc et attachez solidement un cordon entre elles. Choisissez un cordon tressé résistant et pas élastique. Pour ma part j’utilise une sangle plate. Le cordon ne doit pas tendre l’arc, il suit donc le corps de l’arc. Ne tendez surtout pas complètement votre arc car à cette étape l’arc est bien trop puissant et vous avez toutes les chances de le détériorer voire de le briser si vous l’armez trop. Par contre vous pouvez vous rendre compte de sa force en le tendant sur votre balance. Lorsque l’arc sera fini la distance entre la corde arc bandé et l’intérieur de la poignée sera d’environ 6 pouces. Donc si vous tirez maintenant votre cordon à une douzaine de pouces du ventre de l’arc, cet effort correspond à une tension d’environ 6 pouces sur l’arc possédant sa corde définitive. Seule l’expérience vous permettra d’évaluer la force de l’arc fini en fonction de la force que vous venez de mesurer, alors prenez des notes et engrangez votre expérience. A cette étape cherchez simplement à descendre la puissance de l’arc à une dizaine de livres en dessus de celle désirée pour un flatbow et à une quinzaine de plus pour un longbow. Cherchez aussi une bonne symétrie géométrique des deux branches. Attention n’armez toujours pas votre arc à pleine allonge c’est encore bien trop tôt.

Vous trouverez en page suivante, à titre indicatif, afin de vous aider, les tables poids/allonge de deux de mes arcs finis.

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Courbe Poids/Allonge d’un flatbow de 69 pouces en frêne d’une puissance de 42 livres à 28 pouces d’allonge.

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Courbe Poids/Allonge d’un longbow de style anglais de 70 pouces en Hickory d’une puissance de 55 livres à 28 pouces d’allonge.

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A partir de ce moment là j’ai pour ma part vraiment la sensation que l’arc est né. Si vous réalisez un longbow c’est le moment de lui donner la fameuse forme en D. A l’aide d’une plane ou d’un rabot commencez à réaliser des chanfreins, puis faites évoluer la forme vers un D. Vous allez maintenant devoir tailler les coches dans les branches afin de pouvoir bander votre arc pour la première fois. Bander, veut simplement dire monter la corde sur l’arc, alors qu’armer veut dire mettre l’arc en position de tir à pleine allonge. A l’aide d’un couteau ou d’une petite lime queue de rat il vous faut réaliser les coches des poupées. Coche est le nom donné aux entailles permettant de maintenir la corde à l’extrémité des branches. Si vous voulez réaliser des poupées en corne comme les longbows traditionnels anglais ne creusez pas trop les coches car elles serviront seulement momentanément, lors du tillering.

Une fois les coches réalisés et avant de bander l’arc, passez un petit coup de papier de verre fin sur toutes les surfaces de l’arc. Ce passage au papier de verre a pour but l’élimination de toutes les arrêtes vives et de tous les petits défauts de surface avant de passer à la phase la plus délicate : le tillering.

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Les coches qui servent à retenir la corde sont réalisées à 45°. C’est l’emplacement de ces encoches qui détermine la longueur en pouce de votre arc.

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Exemples de différentes poupées sur mes arcs.

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L’équilibrage des branches

Lors de cette étape vous allez devoir bander votre arc avec la corde définitive. La première solution est d’aller rendre visite à votre marchand d’arcs favori et lui demander une corde tressée pour longbow à la longueur de votre arc et à sa force à votre allonge. Par exemple demandez une corde tressée de 70 pouces et 55 livres. La force de l’arc déterminera le nombre de brins dont la corde sera faite. Pour la longueur mesurez sur le dos de l’arc la distance entre les coches des poupées. Si vous voulez réaliser votre corde vous-même, ce qui est relativement simple, vous trouverez chez votre marchand le Dacron pour celle-ci. Les méthodes de réalisation sont très bien décrites dans de nombreux ouvrages comme : Le monde de la Chasse à l’Arc’ de Daniel Chaste et Frédéric Chaptal. Les puristes doivent être choqués, car ils utilisent uniquement des fibres naturelles ; végétales tel que lin et chanvre ou animales comme les tendons, soies, peaux ou crins et autres … Avant de bander votre arc assurez-vous que le dos de votre arc ne présente pas de défaut, pas de petites entailles, si c’est le cas poncez le bien afin d’obtenir une surface parfaite à l’aide de papier de verre d’un grain de 400. Attention de ne pas percer un cerne, sinon c’est reparti pour un tour.

Lorsque vous montez votre corde vous devrez régler le band de votre arc. Pour le band de l’arc il y a deux écoles. La méthode anglaise qui définie le band de l’arc comme étant la distance entre le dos de l’arc à la poignée et la corde et ma méthode américaine qui mesure le band de l’arc entre le ventre de l’arc à la poignée et la corde. Ce réglage s’effectue en torsadant plus ou moins la corde. Le band est fonction de la hauteur de l’arc.

Suivant la méthode américaine qui est la plus couramment utilisée :

üUn band de 5 ¾ pouces pour un arc de 66 pouces.

üUn band de 6 pouces pour les arcs de 68 à 70 pouces.

üUn band de 6 ¼ pouces pour les arcs de 72 pouces.

Ajoutez en gros un pouce à ces bands si vous utilisez la mesure à l’anglaise.

Pour l’équilibrage des branches vous pouvez utiliser soit la barre de tillering telle que précédemment décrite dans le chapitre ‘Les outils’ ou si vous avez un peu de place dans votre atelier, réalisez un tableau de tillering. Ce tableau permet d’avoir une vision de l’arc armé à différentes allonges à une distance parfaite de quelques mètres. Pour réaliser cet outil fixez un panneau de bois sur lequel vous aurez auparavant quadrillé. En haut et au centre de ce tableau vous placerez une équerre qui aura pour but de maintenir la poignée de l’arc. En dessous du tableau et au centre vous placerez une poulie qui aura pour rôle de renvoyer vers vous la cordelette qui sera fixée à la corde de l’arc. En tirant sur le cordon vous pourrez donc voir fléchir les branches de votre arc à diverses allonges.

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Cet outil simple à réaliser est un plus pour réaliser un bon équilibrage des branches. Un panneau quadrillé fixé au mur sur lequel on fixe une équerre afin de maintenir la poignée de l’arc. Un anneau fixé au mur permet à l’aide d’une corde de visualiser la symétrie des branches à une distance idéale.

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Maintenant à l’aide de la barre de tillering ou de votre tableau armez le à 15 pouces et observez la courbure des branches. La barre de tillering ou l’équerre et le cordon de votre tableau de tillering doivent être placés au centre de l’arc et le milieu de la corde. Le plus simple si vous utilisez une barre de tillering est de poser l’ensemble, arc et barre, à plat sur une grande feuille de papier quadrillé. Dans cette position alignez la barre parallèlement à une verticale de votre quadrillage, et vous verrez immédiatement les défauts.

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En posant l’ensemble barre de tillering arc sur une feuille quadrillée, vous pourrez visuellement contrôler la forme de votre arc et réaliser des mesures de comparaison des deux branches. La côte a devra et égale à la côte a’ et de même pour la côte b et b’.

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Si vous avez suivi l’un des plans donnés, votre arc devrait avoir une belle courbe bien pleine. Si ce n’est pas le cas le schéma suivant vous montrera les trois profiles types que vous pouvez obtenir.

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L’arc A montre une bonne flexion des branches. L’arc B fléchit trop à la poignée. L’arc C a les bouts des branches trop souples.

Si votre arc ressemble à l’arc A c’est gagné. S’il se rapproche du profile de l’arc B ou C vous allez être obligé de corriger ces défauts en enlevant du bois sur le ventre des branches de l’arc B ou en amincissant la base desbranches de l’arc C. Dans ces deux cas votre arc va perdre une bonne partie de sa puissance. Il est quand même plus facile et moins coûteux en puissance de corriger le défaut de l’arc C. Si votre arc perd trop de puissance durant un tillering laborieux, la seule solution pour remonter en puissance est de raccourcir les branches en taillant de nouvelles coches.

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Contrôle de courbure d’un arc. Réalisation et photo :

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Mis à part ces gros défauts il est plus que probable que vos deux branches n’aient pas la même courbure. Vous pouvez rencontrer deux problèmes. Le premier est une différence de puissance des branches. C’est-à-dire qu’une branche plie plus que l’autre, dans ce cas avec une plane ou un grattoir enlevez doucement du bois sur le ventre de la branche qui est la plus rigide. Pour contrôler l’efficacité de votre travail, armez et relâchez plusieurs fois de suite votre arc avant de refaire une nouvelle mesure. Allez doucement car sans cela vous allez devoir gratter une branche puis l’autre et vous obtiendrez un arc de très faible puissance. Ne dépassez pas une allonge de 20 pouces. Le deuxième problème qui peut vous arriver vient d’une non-homogénéité du bois lui-même. Ce problème provoque une raideur ou une souplesse excessive d’une partie d’une branche. Pour une raideur pas de problème corrigez en enlevant du bois côté ventre afin de corriger ce défaut. Une souplesse est plus gênante car vous devrez corriger en enlevant du bois sur tout le ventre de vos branches excepté à l’endroit de cette faiblesse. Vous risquez donc de faire trop baisser la force de votre arc. De toute façon allez doucement, débandez votre arc souvent et pensez bien à le tendre et détendre plusieurs fois entre chaque grattage sans toutefois dépasser les 20 pouces d’allonge. Une fois que vous avez obtenu une bonne symétrie des branches à 20 pouces répétez l’opération à quatre pouces en dessous de votre allonge réelle, soit à 24 pouces si votre allonge est de 28 pouces. Cette phase du tillering se réalise corde montée sur l’arc et uniquement à l’aide d’un grattoir ou d’un couteau de chasse. Pensez bien à toujours armer l’arc plusieurs fois entre chaque contrôle. Il est normal qu’après cette opération votre arc ne soit plus parfaitement droit une fois la corde démontée. Il aura ce qu’on appelle du suivi de corde. C’est-à-dire qu’une fois débandé l’arc conservera une légère courbure. Le suivi de corde dépend de l’essence du bois choisi, de la force de votre arc et de sa longueur. Il est normal d’avoir entre 1 et 2 pouces de suivi de corde. Si vous avez plus c’est soit que votre bois était trop vert, soit que l’arc est trop puissant et que vous avez dépassé la résistance mécanique du bois. Un arc fonctionne très bien avec un peu de suivi de corde. Si vous avez dépassé la résistance mécanique du bois vous allez avoir un arc de moins en moins nerveux et de moins en moins puissant. Vous aurez donc fabriqué un arc décoratif ou du petit bois pour allumer le feu. Il m’est arrivé de construire un arc en frêne dont l’ébauche avant le tillering laissait prévoir un arc de 60 livres à 28 pouces et qui durant le tillering est tombé à moins de 30 livres avec un suivi de corde de plus de 3 pouces. Ceci s’appelle un échec et il n’y a pas de solution pour revenir en arrière. Passer plusieurs heures à espérer voir naître un arc et devoir se contenter d’un peu d’expérience n’est pas chose facile.

Maintenant votre arc est pratiquement fini et avant de passer à la phase de finition il est possible de rectifier sa forme et ses imperfections géométriques. La correction d’une branche un peu vrillée, la modification de la forme générale de l’arc en lui donnant un peu de réflexe, tout ceci est possible. Là encore il existe plusieurs techniques, toutes utilisent la chaleur. En chauffant le bois il est possible de modeler sa forme comme le faisaient les fabricants de ski en frêne pour relever la spatule. Les skis étaient réalisés plats dans un premier temps puis les spatules étaient mises en forme par la suite. Les fabricants de skis trempaient le plus souvent la spatule des skis dans de l’eau bouillante pendant environ un quart d’heure puis à l’aide de serre-joints les fixaient contre une forme. Lorsque le bois avait séché et retrouvé la température ambiante les serre-joints étaient démontés. Cette méthode peut être appliquée à l’arc mais le problème est de trouver un récipient permettant de tremper au moins la moitié de l’arc. Si vous chauffez l’une des branches de l’arc, peu importe la technique utilisée, il faut toujours appliquer le même traitement à l’autre même si vous n’en avez qu’une seule à corriger.

Une autre méthode est celle de la vapeur d’eau. L’utilisation de cette solution donne de meilleurs résultats si l’arc entier est dans la vapeur d’eau pendant trente minutes à une heure. Il vous faut donc réaliser un petit montage qui peut être par exemple une boîte couverte contenant l’arc à plat dans laquelle vous introduirez deux ou trois sources de vapeur. Une autre solution est d’utiliser quelques morceaux de tuyau de poêle placés à l’horizontal et reliés à une extrémité par un coude à la source de vapeur.

La troisième technique est celle du chauffage direct à la flamme ou par l’intermédiaire, comme le faisait Ishi (Voir bibliographie), d’une pierre chaude. Le chauffage direct demande plus d’expérience car le contrôle de température n’est pas des plus simples et les brûlures du bois arrivent plus vite que prévu. L’avantage du chauffage direct est sans aucun doute sa rapidité. N’oubliez pas de vous munir de protections et de tester à froid les gestes que vous allez devoir réaliser à chaud. Votre arc aura atteint une température avoisinant les cents degrés et aucune main ne peut supporter cette chaleur. Pour moi et comme la plus part d’entre vous 60 degrés est la limite après laquelle je ne peux plus tenir durablement un objet en main.

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Voici deux schémas de boîte à vapeur. Celle du haut sera réalisée en contre-plaqué ou autre, sous les deux trous ‘’Entrées de vapeur d’eau’’ vous placerez deux casseroles d’eau sur deux réchauds. Quelques petits trous sur le dessus permettront la circulation de la vapeur. Pour la solution du bas le tuyau de sortie de vapeur sera obstrué en laissant juste de légères fuites pour la circulation de la vapeur. Dans les deux cas l’arc sera posé à l’horizontal sur des petites cales en bois.

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Si vous avez chauffé votre arc, avant de passer à la finition, contrôlez encore une fois l’équilibrage des branches et effectuez les corrections si besoin.

Si vous êtes un archer averti vous devez revenir sur le tillering afin de le parfaire en fonction de votre prise de corde. Dans ce cas vous pourrez fignoler votre tiller en plaçant la barre de tillering entre l’emplacement de votre majeur sur la corde et le centre de l’arc, qui sera un pouce en dessous du passage de flèche.

La finition

Cette étape commence par la finition des coches. Il va falloir vous assurer que les coches réalisées sont assez larges pour permettre aux boucles de la corde de ne pas plier trop quand vous armerez votre arc. Les coches trop étroites cisaillent les cordes aux boucles. N’oubliez pas vous n’avez toujours pas armé votre arc à pleine allonge. Après cela un polissage méticuleux de toute la surface de l’arc s’impose. J’utilise des papiers de verre de plus en plus fins jusqu'au papier de 400. Quand la surface semble parfaite, Je passe au pinceau une fine couche d’eau sur toute la surface du bois. Cette opération a pour but de faire relever les fibres. Si vous voulez teinter le bois avec un colorant à l’eau vous pouvez le faire à cette occasion en additionnant un peu de pigments pour bois à votre eau. Une teinte un peu foncée fait ressortir les veines des bois blancs comme le frêne. Après séchage je repasse le papier de verre de 400 puis j’utilise la paille de fer très fine pour donner un poli encore plus parfait. Une fois ce polissage fini j’utilise soit de l’huile de lin, soit des produits hydrofuges que vous trouverez dans tous les magasins de bricolage. Il ne me semble pas concevable de passer un vernis sur un arc simple, ce serait comme le mettre dans une vitrine. Un arc en bois est fait pour vivre, pour évoluer et se patiner avec le temps.

L’huile de lin convient très bien aux arcs simples et conserve au bois sa beauté naturelle. L’huile de lin pénètre très lentement dans le bois donc n’hésitez pas à passer plusieurs couches à plusieurs jours d’intervalle. Avant de passer une nouvelle couche j’essuie les résidus de la précédente à l’aide d’un chiffon doux. Quand le bois n’absorbe plus l’huile, je le laisse deux ou trois jours à température ambiante en essuyant les surplus d’huile. Concernant les produits modernes et hydrofuges qui présentent une bonne alternative de protection longue durée à l’huile de lin, je passe une couche grossière au pinceau sur tout l’arc et j’essuie aussitôt à l’aide un chiffon doux et absorbant en coton, puis, je laisse sécher une nuit. Avant de repasser une autre couche je repasse une laine d’acier très fine. Deux ou trois couches suffisent à obtenir une bonne protection et un état de surface très agréable respectant le bois. La qualité de ce fini s’entretient en passant régulièrement une bonne cire.

Pour les longbows il ne reste plus qu’à mettre une poignée en cuir, passer une couche de cire et l’arc est fini. Afin d’éviter que le cuir ne glisse à l’usage sur la poignée de l’arc je place en dessous un morceau d’adhésif double-face. Pour les flatbows il reste à réaliser un optionnel repose flèche en bois ou en cuir. Un repose flèche en cuir aura la même forme que celui en bois (voir schéma en page suivante). Il sera réalisé en contre collant plusieurs couches de cuir. Cette petite pièce permettra à vos flèches d’être toujours positionnées exactement au même endroit sur la poignée de l’arc. Personnellement je colle le repose flèches sur l’arc avant de recouvrir la poignée avec un cuir. La poignée en cuir peut être soit collée soit cousue sur le dos de l’arc. Les Anglais quant à eux enroulent souvent autour de la poignée une bande de cuir d’un petit pouce de large en hélice. Tout est possible en finition et le goût de chacun permettra de mettre en évidence vos talents artistiques. Les amoureux des arcs des indiens d’Amérique pourront réaliser des peintures en couleurs sur le dos de l’arc ou encore le recouvrir d’une peau de serpent. La peau de serpent n’a aucun rôle mécanique, son seul but mis à part esthétique est deprotéger le bois de l’humidité. Cette protection naturelle est utile pour les flatbows donc le dos est recouvert de tendons. Les tendons, collés à l’aide de colle de peau, ont la fâcheuse tendance à s’étirer et se décoller par temps humide.

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Un petit repose flèche en bois ou en cuir collé est souvent fixé sur les poignées des flatbows. Son but est d’améliorer la position de la flèche sur l’arc. Pour les longbows anglais la flèche repose directement sur la main tenant l’arc.

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Maintenant réalisez votre repère sur la corde afin d’avoir un détalonnage de flèche de quatre à six millimètres. La flèche sur un arc bandé est encochée sur la corde, non pas suivant un angle de 90° mais quelques millimètres plus haut. Ce sont ces millimètres que l’on appelle le détalonnage. Maintenant votre arc est prêt allez l’essayer à pleine allonge avec des flèches adaptées. Pour les non-archer, ne tirez jamais à vide, c’est-à-dire sans flèche car l’arc aurait de grande chance de se briser. Pour tous, ne laissez pas votre arc simple bandé lorsque vous ne l'utilisez plus et ne le laissez jamais bandé en plein soleil

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Exemples de poignées réalisées en cuir, soit collé soit cousu.

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La fiche d’arc

Je remplis pour chaque arc que je finis une fiche descriptive incluant la date de fabrication, le bois utilisé, ses dimensions, sa courbe poids/allonge, son band, son suivi de corde, … Ce document est l’image de l’arc quand il tire sa première flèche. Le but de cette fiche est premièrement de suivre l’évolution de l’arc en refaisant les mêmes mesures plus tard. L’ensemble de ces fiches constitue aussi de très intéressantes références pour acquérir de l'expérience. Au dos de la fiche, je dessine l’arc en notant ses dimensions et toutes autres informations pouvant m’être utiles par la suite. Ces notes décrivent par exemple la date et le lieu de coupe de l’arbre, combien de temps le bois a séché. Vous trouverez en page suivante l’exemple de ma fiche. A l’aide de ces fiches vous pourrez, par exemple, étudier le suivi de corde de vos arcs en fonction du temps de séchage du bois. Même si vous ne voulez pas construire plusieurs arcs ces notes vous permettront de savoir si votre arc perd de la puissance en vieillissant.

Si votre arc prend trop de suivi de corde tout en perdant de la puissance vous pourrez le considérer comme proche de sa fin. Il sera donc plus sage de le laisser comme souvenir accroché au mur car son bois a dépassé ses limites d’élasticité et ne retrouvera jamais ses performances premières. Tout comme quand j’étais enfant et que seul les premières pages de mes cahiers étaient propres, il m’est difficile maintenant de tenir ces fiches à jour. Quoi qu’il en soit, je pense que c’est une bonne méthode, bravo si vous y arrivez.

 

 

 

LES ARCS RENFORCES

La colle

A l’ère de l’apologie du tout synthétique, de la disparition du travail au profit de la mécanisation assistée, dans cette époque de règne marketing où un produit toujours plus « nouveau » en remplace un autre un peu moins « nouveau », les savoir-faire disparaissent peu à peu. Ces connaissances s’évanouissent, et nous devenons de moins en moins autonomes. Par exemple, jusqu’à une époque récente, tout paysan possédait une forge dans laquelle il savait fabriquer ses propres outils, tremper ses burins, fabriquer un fer à cheval, ou bien savait comment utiliser de la poudre de sabot pour cémenter une lame.

Le produit dont je vous propose d’aborder ici la fabrication est la colle, plus particulièrement, la fabrication d’une des colles les plus résistantes qui ait été utilisée jusqu’à l’avènement des colles synthétiques : la colle de tendon, de peau ou plus généralement, la colle à base de collagène, un produit que l’on pourrait étiqueter de « très ancien » celui-là.

Les performances mécaniques de cette colle sont à peu près équivalentes à celles d’une colle époxy vendue aujourd’hui dans toute surface de bricolage. Mais, autant l’avouer tout de suite, la colle à base de collagène présente un défaut majeur : elle est soluble dans l’eau. Tout objet collé avec cette colle, soumis à un climat humide ou pluvieux se fragilisera très vite. Même recouvert d’une protection, comme le vernis par exemple, il ne résistera pas à l’exposition prolongée sous une pluie battante. Personnellement, je n’emmène jamais à la chasse un arc pour lequel j’ai utilisé de la colle à base de collagène, lorsque le temps est menaçant ou lorsque le stade des menaces est dépassé (et je sais de quoi je parle, parole de normand !).

Pourtant, cette colle est l’élément indispensable à la pose de tendon sur le dos d’un arc. Je n’ai pas trouvé de remplaçant, les colles modernes ne se mariant pas avec le tendon. De plus, tendons et colle sont comme Castor et Pollux, indissociables.

Le collagène est une protéine complexe qui forme la substance de base à l’architecture de toute cellule animale. Cette substance est donc très répandue dans la nature. Elle existe en forte concentration dans certains tissus, comme le tendon, la peau, les os. Ainsi tous ces tissus peuvent être utilisés pour fabriquer de la colle. Certains sont plus disponibles que d’autres, ou bien plus faciles à utiliser pour extraire le collagène.

Cette colle était connue de la plupart des indiens d’Amérique du Nord dans la fabrication de leurs arcs, comme les Hupa, les Wintu, les Chinook pour les tribus de la Côte Ouest, ou les Blackfoot, les Snake, les Crow, les Nez Percé ou les Sioux, pour les tribus des plaines et des contreforts des Rocheuses. Mais les peuples qui en ont fait un emploi des plus raffiné en matière d’archerie, sont les peuples du Moyen-Orient et d’Asie avec les arcs composites. Courts, avec des courbures exacerbées, constitués de bois, de cornes et de tendons, les arcs composites utilisaient la colle la plus résistante que l’on pouvait fabriquer à cette époque : la colle à base de vessie natatoire de poisson.

Fabrication de la colle de tendons

Fabriquer de la colle à partir de tendon est relativement simple. Il suffit de réunir du tendon, de l’eau, une gamelle, un foyer et du temps.

Le tendon à utiliser peut être récupéré de la même manière que celle décrite dans le chapitre sur le backing. Les tendons séchés doivent être battus à l’aide d’un marteau, puis séparés en minces fils. On conservera les morceaux les plus longs pour le backing et on utilisera les plus courts pour réaliser la colle. Après avoir réuni plusieurs pelotes de fils de tendons, les mettre dans le fond d’une gamelle et les recouvrir d’eau. Laissez-les tremper pendant 2 jours. Ensuite, mettre le tout à chauffer sur le feu pendant 24 heures. Mais attention, pour réussir votre colle, vous ne devrez jamais porter l’eau, et ensuite la colle, à une température supérieure à 80°C. Passé cette température, les cellules des tendons vont être irrémédiablement détruites. Dans le meilleur des cas, vous obtiendrez une colle de faible résistance, dans le pire, vous serez bon pour aller à la pêche au tendon complètement ratatiné, épais et flasque. Par ailleurs, en ne dépassant pas cette température, votre mixture peut mijoter tranquillement et réduire très lentement, sans jamais avoir besoin d’ajouter de l’eau. Par ailleurs, il faut savoir que plus on chauffe une colle en préparation (intensité ou durée), moins elle sera forte (ceci est également vrai lorsqu’on utilise la colle).

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Pelote de tendon : les tendons les plus courts et certains morceaux durs ne pourront pas être utiles pour le backing. Ils peuvent alors servir de matière première pour la fabrication de la colle.

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Remuez de temps en temps. Et prévenez votre femme. De la diplomatie s’impose. En effet une odeur désagréable va se répandre dans toute la maison pendant ces 24 heures. Expliquez-lui que vous êtes en train de réveiller le primitif qui est en vous et que cette expérience est unique. Tout le monde ne redevient-il pas primitif un jour ?

Au bout d’une douzaine d’heures, vous pouvez réaliser un premier écumage. Augmentez un peu la température pendant 10 minutes afin de laisser remonter toutes les impuretés à la surface. Le liquide est à présent un sirop assez fluide. Retirez toutes les graisses qui surnagent. Puis versez le liquide qui se trouve en surface dans une assiette creuse. Vous venez d’obtenir votre première colle.

Laissez le reste mijoter pendant encore 12 heures. Au bout de ces 12 heures, et après avoir retirer les éventuelles impuretés, versez tout le liquide dans autant d’assiettes creuse qu’il sera nécessaire après l’avoir fait passer à travers un vieux T-shirt. Laissez refroidir pendant quelques heures. Puis coupez des cubes dans cette gélatine en formation. Au bout de quelques jours, l’eau se sera complètement évaporée et vous obtiendrez des cubes très durs. Pour les conserver, enfermez-les dans un bocal étanche.

On peut réaliser la même colle avec de la peau de lapin, de la peau de poisson ou des vessies natatoires de poisson. Le procédé est le même. J’ai également tenté d’en fabriquer avec de la peau de pied de bœuf, mais les morceaux étant trop épais, ils ne se sont pas désintégrés et la colle ne s’est pas formée.

Pour utiliser la colle, recouvrir la quantité de cubes dont vous avez besoin avec de l’eau. Laissez gonfler pendant quelques heures, chauffez-la au bain-marie. La température idéale d’utilisation se situe entre 40 et 60°C. Il vous faudra maintenir cette température pendant l’application de la colle, l’idéal étant même de chauffer (à l’aide d’un sèche-cheveux par exemple) les pièces à encoller à la même température que la colle. Les surfaces devront être propres et dégraissées avec de l’acétone. Laissez sécher pendant au moins une semaine.

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Cubes de colle : après quelques jours de séchage, les cubes de colle sont aussi durs que de la pierre. Pour les utiliser, les couvrir par un peu d’eau et laisser gonfler. Pour le collage, portez la colle a une température de 40 à 60 °C.

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Lorsque vous collez des tendons, la température d’utilisation devrait être de 40°C. Au-delà, vous risquez d’endommager les tendons. Il arrive d’avoir besoin d’une petite quantité de colle, pour laquelle il est fastidieux d’attendre que le bain-marie ait fait son effet. Dans ce cas, j’utilise le four micro-onde, que je laisse tourner seulement une dizaine de secondes.

Si vous n’avez pas réussi votre alchimie, ou si vous avez un besoin urgent de colle, vous pourrez toujours vous rendre dans une droguerie spécialisée. Vous y trouverez de la colle de peau de lapin pour quelques dizaines de francs les 100 g. Mais je suis persuadé que vous ne resterez pas sur un échec…

Backing

Un longbow de 70 pouces, d’une puissance de 60 livres est une arme des plus précise et silencieuse qui soit. En outre, elle reste assez simple dans sa construction et ne demande pas trop de temps. Pourtant, lorsque l’on regarde les arcs utilisés à travers le globe, le longbow n’est pas universellement répandu. En fait, on s’aperçoit qu’il existe des liens très étroits entre le milieu naturel, l’emploi et le type d’arc utilisé. Par exemple, les Wayanas de Guyane se servent de longbow fabriqués à partir d’un géant de la forêt qu’ils nomment Païla. L’armement se fait sur cinquante centimètres et ces arcs d’une puissance de trente cinq à quarante livres à cette allonge sont capables de faire voler des flèches de près de deux mètres à des distances considérables. J’ai quelque peu réfléchi sur les raisons qui ont conduit ces indiens, arrivés il y a des milliers d’années en Amazonie, à adopter ce type d’arc, sans band, avec des flèches aussi longues. J’ai également interrogé des facteurs d’arc américains et français. Je pense, en définitive, que deux éléments sont déterminants. Tout d’abord, la densité végétale de la forêt, a pu amener ces hommes à allonger leurs flèches, afin de les retrouver plus facilement après le tir. Parallèlement, dans cette atmosphère si humide, les matériaux qu’ils ont trouvés pour fabriquer leurs arcs prendraient probablement beaucoup de corde s’ils étaient bandés comme nos arcs. Ainsi ils perdraient très vite leur élasticité. De plus, un band réduit à néant et une longue flèche, se marient parfaitement pour éluder un des principaux soucis de notre archerie : le paradoxe. Il n’existe pratiquement pas.

Ce type de longbow se retrouve dans toute l’Amérique amazonienne. Dans les zones géographiques à l’écologique comparable, c’est à dire en Afrique équatoriale, en Océanie et Papouasie - Nouvelle Guinée, on retrouve un profil d’arc similaire. Pourtant aucune communication n’a eu lieu entre ces peuples qui ont conquis ces zones à des époques très différentes. Seuls les peuples des îles Andaman du Golfe du Bengale construisent des flatbow aux branches asymétriques, larges et minces près de la poignée et fines et épaisses aux extrémités.

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Anaïmin, Indien wayana de Guyane, essaie le dernier longbow qu’il vient de terminer à mon attention. Cet arc est fait d’un morceau brut dans lequel Anaïmin n’a pas strictement suivi les cernes du bois. Pourtant, le dos n’est pas renforcé. Le band est réduit à néant et les flèches mesurent près de 2 mètres.

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M’Be, Pygmée Baka du sud-est Cameroun, vient de flécher une petite vipère venue troubler la quiétude de notre camp, avec un arc des plus simple.

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A contrario, dès que le milieu naturel devient désertique, le profil des arcs change complètement. Dans un milieu désertique et froid comme le Groenland par exemple, les arbres faisaient complètement défaut. Les Inuits de la région de Thulé employaient des arcs pour la chasse à la fin du XIXème siècle. Ils durent utiliser les seuls matériaux suffisamment longs et flexibles dont ils disposaient : des côtes de rennes (ou de baleines échouées). Pour lier ces morceaux épars, ils employaient des tendons de narval. Ils fixèrent également une corde de tendon tout le long du dos de l’arc afin de donner plus de puissance à leurs arcs. Enfin ils adoptèrent un profil avec des courbures.

En Californie du Nord, Ishi le dernier des Yahi utilisait un arc relativement court (40 pouces) entièrement reflex et recouvert de tendons. La raison du choix d’un tel arc provient probablement de l’absence de morceau de bois suffisamment long dans l’essence qu’il destinait à la construction d’un arc : le genévrier. Par ailleurs, il ne souhaitait pas atteindre une puissance supérieure à 40 livres, cette puissance étant adaptée à son mode de chasse et au gibier convoité.

On voit bien à travers ces exemples que le choix d’un profil d’arc et de sa construction dépendent fondamentalement du milieu naturel et de la destination de l’arc. C’est pourquoi, la décision de recouvrir le dos de l’arc avec des tendons ou avec tout autre matériau obéit à des nécessités et n’est pas un simple moyen artificiel d’augmenter la puissance d’un arc.

Prenons le longbow de 70 pouces et de 60 livres de puissance, recouvrons-le de tendon, et l’arc perdra une partie de sa vitesse. En effet, le tendon et la colle sont 2 fois plus lourds que le bois. L’addition de tendon sur un arc d’une telle longueur ralentira la vitesse des branches, sans augmenter leur stress.

Mais, pour être durables, voire concevables, certains arcs courts ou très stressés doivent avoir un dos renforcé (appelé « backing » en anglais). Le matériau roi en la matière est le tendon, accompagné de colle naturelle (de tendon ou de toute autre matière contenant une quantité importante de collagène). La pose de tendon permet à l’extrémité des arcs à courbures de jouer leur rôle de levier sans se détendre, et au reste des branches de résister à la violente compression et extension qu’ils subissent. L’épaisseur de tendon ainsi posée modifie le plan de compression du bois et assure ainsi la majorité du travail des branches. Par ailleurs, il maintient les éventuels éclats de bois qui pourraient apparaître sur le dos de l’arc. L’application de tendon peut également être réalisée pour augmenter la puissance d’un arc ou réparer un arc brisé. Techniquement, il est dix fois plus élastique que le bois et peut donc stocker plus d’énergie par unité de poids. De plus, il rétrécit de 4 % en séchant, c’est pourquoi il est préconisé pour diminuer le suivi de corde.

Mais, le désavantage du tendon est que la colle qui sert à le fixer est soluble dans l’eau. Par conséquent, tout backing est vulnérable dans des climats humides ou lors d’une exposition prolongée à la pluie. Ceci peut alors réduire considérablement les performances de l’arc, voire le conduire à la casse. De plus, la préparation et l’application de tendons demandent une charge de travail importante très consommatrice de temps.

Quels tendons doit-on employer ?

On trouve des tendons chez tous les mammifères qui nous entourent. Afin de se faciliter le travail, on recherchera des tendons assez longs. Plus ils seront longs, plus les fibres obtenues permettront de couvrir de grandes surfaces, ce qui minimisera le temps de pose des tendons. L’idéal est d’utiliser des tendons de pattes de cervidés. On en trouve également dans les pieds de bœuf. Ils sont de bonne taille et relativement épais. Certains prétendent que les tendons de cervidés sont de meilleure qualité que les tendons issus d’animaux domestiques. Personnellement, je n’ai pas noté de différence et j’emploie indistinctement des tendons des deux origines, même si les tendons de cervidés sont plus traditionnels. On peut se procurer des pattes de cervidés dans des élevages ou des grossistes en gibiers. Les pieds de bœufs se trouvent dans n’importe quel abattoir (même si ces derniers tendent à disparaître).

Les cervidés peuvent également fournir de larges bandes de tendons que l’on trouve sur leur dos, à l’endroit où prennent naissance les filets.

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Tendons vus par Emmanuel Martin…

Extraire le tendon à l’aide d’un couteau bien aiguisé en ayant surtout soin de ne pas entailler les fibres. Les mettre à sécher à l’ombre dans un lieu aéré. Cet endroit devra être isolé des animaux comme les chats, les chiens et les souris qui sont de grands amateurs de cette friandise. A tel point que lorsque je manipule des tendons ou de la colle, mon chien ne me lâche pas d’une semelle pour profiter de toute maladresse de ma part. Au bout de quelques jours, les tendons qui étaient, mous, opaques et de couleur blanche au départ, deviennent durs, translucides et couleur de miel.

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Cette photo montre un tendon extrait d’une patte de chevreuil.

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Celle-ci présente un tendon de pied de bœuf. Ce dernier contient beaucoup plus de fibres et est un peu plus facile à éclater.

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Pour préparer des tendons destinés à servir de backing, il faut tout d’abord éclater ces tendons afin d’en séparer les fibres. L’idéal est de les battre à l’aide d’un marteau sur une enclume en prenant garde de frapper bien à plat afin que le marteau n’endommage pas les fibres. Il faut ensuite séparer ces fibres en fils de plus en plus minces. De cette manière, vous allez obtenir des fibres de longueurs inégales. Plus les fils seront minces, plus la finition du backing sera douce. Faîtes des paquets en réunissant les morceaux de même taille (par 6 ou 8). Ceci permet de les classer et de pouvoir ensuite choisir les fils les plus appropriés au moment de leur application sur le dos de l’arc. Pour conserver les paquets sans les mélanger, on peut les placer entre les pages d’un magasine.

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Lorsque le tendon est éclaté, il perd sa couleur ocre et translucide pour devenir blanc. Les fibres se matérialisent peu à peu.

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Les fibres sont groupées par longueur et réunis par 6 ou 8.

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Pose des tendons

La préparation du dos de l’arc joue un rôle important dans la réussite du backing. Il doit être propre, poncé et dégraissé avec de l’acétone. Certains archers, violentent volontairement le dos à l’aide d’une scie à métaux posée à champs, ou d’une râpe afin de créer une surface plus adhérente entre la colle et les tendons (Attention à ne pas trop affaiblir le dos de l’arc en abîmant le dernier cerne de bois). La colle sera chauffée à une température de 40 à 50°C, la température idéale pour l’application se situant autour de 40°C. Pendant toute la durée d’utilisation, il faudra la maintenir à cette température grâce à un bain-marie alimenté par un réchaud. Commencez par enduire le dos de l’arc avec une bonne couche de colle. La colle va ainsi colmater les pores du bois qui va l’absorber rapidement. Laisser sécher 24 heures.

Les premiers tendons devront être disposer le long de l’axe central de l’arc, en commençant depuis la poignée et en allant vers l’extrémité des branches. Prenez un paquet de tendons d’assez bonne longueur et plongez-les dans la colle. Aidez-vous d’un petit bâtonnet, car les fibres ont toujours tendance à adhérer à la paroi du pot de colle. Laissez-les macérer pendant 10 à 15 secondes afin qu’ils s’en imprègnent. Lorsque vous les aurez sortis, débarrassez-les de l’excès de colle en les passant entre vos doigts et appliquez les sur le dos de l’arc. Il est important à ce moment qu’ils ne se soient pas mélangés et que les fibres restent parallèles.

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Application du tendon : le premier paquet de tendon est posé au niveau de la poignée et forme le premier maillon de la première bande. La seconde bande est disposée de façon à ce que le milieu des tendons se trouve face à l’extrémité des tendons de la première bande.

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Ceci maximise l’efficacité du tendon et permet de couvrir une surface plus large. Pour éviter cela, on peut passer une petite palette ou plus simplement ses doigts sur les tendons, ce qui permet de les disposer correctement en les étalant le plus possible. Le paquet de tendon suivant sera apposé à la suite du premier, sans le chevaucher. Et ainsi de suite jusqu’à former une large bande sur l’axe central de l’arc. La seconde bande de tendon sera appliquée de la même façon, le long de la première, mais en décalant les paquets de tendon de manière à ce que l’extrémité des tendons de la seconde bande soit en face du milieu des tendons de la première, comme pour un mur de briques. Les bords de l’arc peuvent être recouverts par quelques millimètres de tendon qui seront retirés une fois secs à l’aide d’une lime. Ceci évite de laisser des espaces sans tendon le long des bordures. De temps à autre, il n’est pas inutile de se passer les mains à l’eau afin de se débarrasser de l’excès de colle qui y adhère volontiers.

Une fois toute la surface du dos de l’arc recouverte, on peut procéder à la seconde couche en décalant les paquets de tendon de manière à réaliser une sorte de treillage. Combien de couches faut-il appliquer ? Cela dépend en réalité du profil de l’arc que vous avez adopté. Deux couches peuvent être suffisantes pour un longbow mi-long. Par contre, pour les designs un peu plus osés, comme les recurves par exemple, 3 à 4 couches seront nécessaires. Rappelez-vous que le tendon et la colle sont deux fois plus lourds que le bois et qu’il vous faudra choisir entre robustesse et vitesse des branches.

Après avoir appliqué la dernière épaisseur de tendon, badigeonnez le dos de l’arc avec une bonne couche de colle, ce qui vous permettra d’obtenir une surface plus lisse.

Laissez sécher à l’ombre, dans un endroit aéré pendant quelques jours. Une fois que la colle a bien durci, on peut exposer l’arc au soleil afin d’accélérer l’évaporation de l’eau. Le temps de séchage dépend largement des conditions atmosphériques. Une quinzaine de jours est conseillée. Mais ce temps peut être considérablement plus long. Certains facteurs d’arc asiatiques n’hésitaient pas à laisser sécher leurs arcs pendant plus d’une année.

Lorsque le backing est sec, poncez-le de la même manière que le bois et limez les excès de tendons sur les bordures. Vous pouvez maintenant terminer le tillering de votre arc.

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L’arc terminé : détail d’un longbow en if dont le dos a été recouvert avec du tendon.

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L’enduit de protection choisi pour l’arc pourra être utilisé pour le backing. J’obtiens une protection relativement efficace en appliquant une dizaine de couches de vernis. Par la suite, j’expose de temps à autre mon arc au soleil, afin d’en extraire l’éventuelle humidité qui aurait pu s’y incruster pendant son utilisation.

Autres backings

On peut réaliser des backings avec d’autres matériaux. Personnellement, j’en ai réalisé en lin et en écorce de merisier. Aucune particularité n’accompagne la pose de lin. Il faut le choisir relativement fin pour améliorer son efficacité et l’aspect esthétique. L’écorce de merisier est un matériau résistant (quoique moins solide que le tendon), à tel point que lorsque que vous fendez une bûche de merisier, il vous est nécessaire de découper l’écorce au couteau pour arriver à vos fins. On peut également utiliser l’écorce de bouleau nordique, écorce avec laquelle l’ensemble des peuples de Sibérie fabriquaient la plupart de leur vaisselle et de leurs sacs. L’écorce s’applique plus rapidement que le tendon et est plus légère. Elle sera récoltée sur un arbre vert en découpant de larges bandes autour du tronc. Ces bandes seront mises à sécher en étant maintenues bien à plat afin qu’elles ne roulent pas sur elles-mêmes. Pour l’application, j’ai utilisé de la colle de tendon et j’ai enroulé en anneaux très serrés un cordage tout autour de l’arc afin de maintenir l’écorce en contact avec le dos de l’arc.

D’autres matériaux peuvent être employés. La peau de poisson est un matériau que je trouve formidable. J’ai ramené de Yakoutie un couteau dont l’étui est recouvert d’une peau de truite épaisse et très résistante. Je suis à la recherche d’une recette pour son tannage.

Il est également possible d’utiliser du cuir, et bien sûr du bois, mais je ne les ai jamais employés. Enfin, la pose d’une peau de serpent peut être une finition très esthétique qui protégera admirablement de l’humidité.

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Autre backing : arc recouvert avec du lin.

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Autre backing : arc recouvert avec de l’écorce de merisier.

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L’arc à courbure

Si l’arc simple a été inventé à une époque que l’on situe entre 50 000 et 15 000 ans avant notre ère, la première description connue de l’arc à courbure apparaît sur le fourreau d’une épée retrouvée dans une tombe Scythe, datant du 7ème ou 8ème siècle. Dans des formes parfois élémentaires, ce design semble avoir été utilisé depuis très longtemps par un grand nombre de tribus d’Amérindiens du Nord, tels que les Chinooks, Kwakuilts, Nootkas, Wintus, Hupas, Klamaths, Modocs, Karoks, par certains Cheyennes et par les Inuits. Mais les maîtres en la matière furent sans conteste les facteurs d’arc du moyen et de l’extrême orient. L’arc sino-mongol ou arc turc dérive probablement des arcs égyptiens et assyriens. A partir de ces arcs composés de bois, de corne et de tendons, les facteurs d’arc orientaux conçurent un arc à double réflexe, aux extrémités rigides, et dont les matériaux étaient assemblés à l’aide de colle de poisson et de fils de soie. Ce modèle, avec ses variantes tant dans sa forme que dans sa composition, fut adopté au rythme des conquêtes par les Perses, les Hindous, les Mongols, les Chinois, les Coréens, les Parthes, les Scythes, les Huns et tous les peuples du Moyen-Orient. Il fut l’un des instruments majeurs de la domination des peuples des steppes qui défilèrent sur le sol européen et il traîne derrière lui une longue histoire sanguinaire.

La construction d’un arc à courbure va vous demander beaucoup de temps, de persévérance et une bonne dose d’humour. Il faudra continuer à sourire lorsque pendant l’étape du courbage, la branche s’échappera irrémédiablement de la pression des serre-joints, il faudra continuer de manier la plaisanterie lorsqu’au premier armement, vous verrez vos branches se tourner sur elles-mêmes,… Rester patient et méticuleux est la clé du succès. Débarrassons-nous tout de suite des problèmes de vocabulaire. Arc à courbure, à double courbure, à contre courbure, reflex, recurve,... . Certains termes correspondent à différents types d’arcs mais sont souvent employés pour designer le même profil. D’autres sont des anglicismes sans équivalent français.

L’arc setback

C’est un arc dont les branches ont été courbées près de la poignée juste après leur naissance. De ce fait, lorsque l’arc est bandé, la poignée est plus proche de la corde que sur un arc droit. Ce profil est très ancien et on en retrouve les traces grâce à des peintures du mésolithique sur les parois des grottes de Caballos et de l’Alpera en Espagne. Il était largement répandu parmi les Indiens des plaines de l’Amérique du Nord. La courbure près des branches augmente la vitesse de la flèche. Par ailleurs, il est plus facile à réaliser qu’un recurve. Il faut simplement veiller à bien faire courber les branches près de la poignée et le moins possible vers les extrémités, sinon l’angle de corde augmente et l’énergie emmagasinée diminue. Ils doivent être assez grands et fabriqués de façon à ce que les branches courbent le moins possible près des poupées. Il est conseillé de renforcer le dos de l’arc avec du tendon à l’endroit où le bois a été courbé, c’est à dire près de la poignée.

L’arc reflex

Les arcs reflex sont courbés sur l’ensemble de leur longueur. Pour cela on recherche des bois naturellement courbés (plus efficaces que les bois chauffés à la vapeur). Lorsqu’il est entièrement recouvert de tendon, c’est l’arc d’Ishi.

L’arc à faible courbure

Dans ce design, de légères courbures sont réalisées à l’extrémité des branches. Celles-ci sont gardées suffisamment épaisses pour ne pas courber. Ce type d’arc n’est efficace que s’il est court. Autrement, les courbures apportées sont sans effet face à l’excès de poids entraîné par l’épaisseur volontairement conservée pour maintenir la courbure pendant l’armement.

 

 

 

 

 

 

 

Les principaux profils d’arcs à courbure : l’arc setback (a) ; l’arc reflex (b) ; l’arc à faible courbure (c) ; l’arc reflex à faible courbure (d) ; l’arc à courbure (e) ; l’arc reflex-deflex (f) ; l’arc setback à courbure (g).

 

L’arc reflex à faible courbure

Comme son nom l’indique, c’est une combinaison des deux profils décrits ci-dessus. A un arc reflex, on ajoute une légère courbure aux extrémités. Cet arc est deux fois plus performant que les précédents. C’est l’arc des indiens américains du Nord de la côte du Pacifique. Il pouvait être très court (40 pouces). Ainsi, des matériaux très résistants étaient employés, avec des branches larges de plusieurs pouces entièrement couvertes de tendons.

L’arc à courbure

(ou recurve)

Comparé à l’arc à faible courbure, l’arc dont il est question ici se voit infliger de sévères courbures entre 60 et 90° par rapport au plan des branches. De plus, lorsque l’arc est bandé, l’extrémité des branches est en contact avec la corde. Ce point de contact doit occuper une bonne partie de la longueur des branches pour réellement augmenter l’énergie stockée. Deux types d’arc à courbure existent. Le premier est un arc dont les courbures travaillent et se détendent à plein armement. L’autre type est un arc dont les courbures restent fermes (statiques) et permettent de garder un angle de corde faible.

Dans une plus forte mesure, ce design a donné naissance aux arcs sino-mongols et turcs dont certaines versions ont des branches complètement enroulées sur elles-mêmes lorsque l’arc n’est pas bandé. Ces arcs sont souvent courts (entre 40 à 60 pouces) et sont constitués de matériaux très élastiques, enduits de tendons et renforcés avec de la corne. C’est pourquoi on les appelle « arcs composites ». Ils demandent un travail considérable et une grande dextérité de la part du facteur d’arc pour maîtriser l’ensemble de ces matériaux.

 

L’arc turc. Des branches très recourbées constituées de corne, de tendon et de bois, liés par de la colle de poisson, firent de cet arc un des principaux instruments de la domination turque sur l’Europe à partir du XVème siècle. Très court et d’une puissance considérable, cet arc détient toujours un record vieux de 200 ans, lorsque Sellim III envoya une flèche à près de 900 mètres.

 

 

 

Ces arcs étaient très puissants, entre 80 et 100 livres et nécessitaient un entraînement considérable pour arriver à les manier correctement. Ce profil d’arc détient toujours un record vieux de 200 ans pour la distance parcourue par une flèche : près de 900 mètres. Si ce record a été battu par un arc à poulie, il n’a jamais été égalé par un arc traditionnel.

L’arc à double courbure

(ou contre courbure) ou reflex/deflex

A l’arc à courbure décrit ci-dessus, on ajoute un deflex aux branches près des poignées. C’est à dire, que l’on procède tout d’abord au courbage de la branche près de la poignée en direction de l’archer (courbure convexe), puis on réalise une courbure à l’opposée beaucoup plus prononcée (courbure concave). C’est le design le plus efficace (en dehors des arcs composites) qui réunit un armement doux et une grande vitesse de flèche. Le deflex rend moins dure la tension dans les premiers pouces d’armement, et la traction de la corde est plus facile.

L’arc setback à courbure

C’est l’arc des Scythes, des Tatars, dont il a existé de nombreuses variantes au cours de l’histoire du Moyen-Orient et de l’Asie Centrale. C’est également l’arc coréen. Comme l’arc turc, il est constitué d’un assemblage de bois, de tendon et de corne, enduit avec de la colle de vessie natatoire de poisson. Il présente les mêmes caractéristiques que l’arc turc.

 

Sans commentaire.

Mécanique des arcs à courbure

Avantages et inconvénients

L’arc que je vous propose de réaliser ici est un arc à courbure, dont les courbures restent fermes lors de l’armement. A partir de ce modèle, vous pourrez réaliser tous les autres types d’arc, setback, reflex, deflex/reflex… Mais avant d’aborder la partie opérationnelle, il paraît indispensable de comprendre la mécanique des arcs à courbure. En effet, afin de faire les bons choix selon le bois dont on dispose, de trouver le bon dosage entre la longueur des branches, leur poids, le degré de la courbure et la longueur de cette courbure, il convient de comprendre la mécanique des arcs à courbure.

La courbure de l’extrémité des branches a pu être adoptée dans un premier temps dans le but d’éviter que la corde ne glisse hors des coches, les performances acquises ayant été constatées par la suite. Ces avantages sont considérables. Le premier et le plus évident est un gain de vitesse.

En moyenne un arc à courbure envoie une flèche à la même vitesse qu’un arc droit de puissance 20 à 30 % plus élevée. La raison en est que l’énergie stockée est plus importante dans un recurve. En effet, l’arc à courbure est dur à armer dès les premiers pouces de l’armement. Arrivé à la moitié de l’armement, au moment où la tension devrait augmenter de façon intolérable, les courbures prennent le relais et jouent leurs rôles de leviers. Ce sont elles et leur tillering qui emmagasinent la puissance en restant le plus courbé possible. Ce sont elles qui reculent à l’armement, pendant que le reste des branches recule peu. La portion des branches en contact avec la corde n’est pas soumise à une tension avant de jouer le rôle de cames. L’énergie réside surtout dans la résistance des courbures. C’est cette énergie potentielle qui donne toute la rapidité à la flèche. Elle est directement proportionnelle au stress infligé aux branches par la courbure. Ainsi, plus l’angle de la courbure est important, et/ou plus le pourcentage de longueur de branche en contact avec la corde est grand, plus l’arc stockera d’énergie. De plus, l’angle que forme la corde avec la branche reste faible à pleine allonge en comparaison d’un flatbow. On estime que pour que des courbures soient efficaces, elles doivent occuper au minimum 15 % de la longueur de chaque branche quand l’arc est bandé et être d’un angle d’au moins 60° au final.

 

Recurve et longbow : l’énergie emmagasinée est plus importante avec un recurve qu’avec un longbow. C’est cette énergie potentielle qui donne toute la rapidité à la flèche. Elle est directement proportionnelle au stress infligé aux branches par la courbure. Dès les premiers pouces, l’arc est plus dur à armer. Arrivé à moitié de l’armement, au moment où la tension devrait augmenter de façon intolérable, les courbures prennent le relais et jouent leur rôle de leviers.

 

 

Pour être durable, voire concevable, un arc à courbure doit avoir un dos renforcé (appelé « backing » en anglais). Le matériau roi en la matière est le tendon, accompagné de colle naturelle (de tendon ou de toute autre matière contenant une quantité importante de collagène). Les principales caractéristiques du tendon sont les suivantes : le tendon est dix fois plus élastique que le bois, mais pèse deux fois plus lourd que lui. Il peut donc stocker plus d’énergie par unité de poids. Le tendon rétrécit de 4 % en séchant.

La pose de tendon a pour premier objectif de solidifier les courbures. Sans lui, à pleine allonge, les courbures disparaîtraient ou bien exploseraient. Il solidifie également le reste des branches qui subissent une violente compression et extension. L’épaisseur de tendon ainsi posé modifie le plan de compression du bois et assure la majorité du travail des branches. Par ailleurs, il maintient les éventuels éclats de bois qui pourraient apparaître sur le dos de l’arc.

Mais, le désavantage du tendon (et de la colle) est qu’il est deux fois plus lourd que le bois (comme la corne d’ailleurs). Ainsi, les arcs fabriqués à base de tendons (et de cornes) doivent être courts, sinon la masse des branches ralentie leur vitesse, et donc celle de la flèche. On considère que pour les arcs de longueur supérieure à 64 pouces, le backing devient un désavantage.

Il en va de même pour les courbures. Si l’arc est trop long, il y a très peu d’avantage à recourber les branches. En effet, les branches soumises à une grande tension vont suivre la corde et diminuer d’autant le gain de vitesse. La seule solution pour l’éviter serait d’appliquer du tendon, ce qui alourdirait l’arc…

Les courbures sont réellement efficaces sur des arcs courts, au dos renforcé de tendons (il existe d’autres matériaux), avec des branches larges et des matériaux élastiques.

Parmi les différents types d’arcs à courbures décrits ci-dessus, on peut faire les remarques suivantes : les recurves dont les courbures restent fermes à pleine allonge sont plus efficaces que ceux dont les courbures se déplient parce que l’angle de corde lors de l’armement est moins important.

L’arc deflex/reflex (à double courbure) est sans doute le profil le plus efficace. Étant soumis à un stress relatif lorsqu’il est bandé, ce design autorise une puissance faible lors des premiers pouces d’armement. On peut alors utiliser des branches plus épaisses dont la puissance est contrebalancée par les courbures. Les branches effectuent alors moins de travail. Grâce à un parcours de faible ampleur, elles ne sont pas beaucoup plus stressées à plein armement. Ceci permet au bois de stocker plus d’énergie et d’en transmettre davantage à la flèche.

Les autres avantages de l’arc à courbure sont les suivants : ils ont une décoche plus douce (choc moins important) que les longbows. Ceci peut être attribué à un mouvement des branches plus vertical, et également au fait qu’ils sont plus courts, donc moins lourds. Par ailleurs, en raison d’un angle de corde plus faible et d’une puissance plus importante pendant les premiers pouces de l’armement, les recurves ont moins tendance à subitement devenir dur (proche de la rupture) dans les derniers pouces de l’armement. Ce phénomène appartient surtout aux longbows. Un autre point positif du recurve, surtout lorsqu’il est fabriqué à partir de matériaux mécaniquement non transformés, est que le « suivi de corde » a beaucoup moins d’importance que pour un longbow. Si le « suivi de corde » diminue l’efficacité des arcs droits, ce n’est pas le cas des recurves, les doubles courbures jouant leur rôle de came.

Les arcs à courbure sont plus courts. Les arcs courts sont plus faciles à manœuvrer dans les bois ou sur le dos d’un cheval. Cette qualité est importante pour le chasseur qui se meut en forêt. Il peut maintenir une vitesse de flèche élevée (et éviter ainsi que l’animal ne saute à la corde) et réaliser des approches dans des taillis plus épais. Cette qualité fut également appréciée des cavaliers turcs et des peuples d’Asie Centrale, ainsi que des Indiens d’Amérique du Nord lorsqu’ils découvrirent le cheval au XVIème siècle. De plus, cette petitesse permet l’utilisation de morceaux de bois plus courts, qui sont plus faciles à trouver.

 

Recurve statique : lorsque l’arc est à plein armement (photo du dessous), la courbure reste statique. L’angle qu’elle forme avec la branche reste le même que celui de l’arc au repos (photo du dessus). Notez également la faiblesse de l’angle de corde à plein armement, gage d’une énergie potentielle et d’un rendement important.

Toute médaille a son revers, et les recurves présentent certains défauts. D’une manière générale, ils sont moins précis que les longbows. En effet, les branches étant plus courtes, elles jouent moins leur rôle de stabilisateur. Plus dynamiques, les branches sont plus vives et ébranlent davantage l’arc lorsqu’elles reviennent dans leur position initiale. Par ailleurs, les recurves ont une décoche plus bruyante. Ceci peut être attribué au retour de la corde après la décoche qui vient claquer contre le ventre de l’arc. Cet inconvénient peut se révéler un véritable handicap pour le chasseur. Pire, le bruit de la corde peut faire esquisser un mouvement au gibier avant que la flèche ne l’atteigne, entraînant une atteinte dans une partie non vitale. Notons que ce dernier défaut peut être atténué en tirant des flèches un peu plus lourdes que la normale. Elles absorberont mieux l’énergie. Elles seront également plus pénétrantes, ce qui ne sera pas sans déplaire au chasseur.

Mais l’inconvénient du recurve réside avant tout dans sa construction. Tout d’abord il est très long à construire par rapport à n’importe quel longbow. Ce dernier peut être réalisé en quelques heures par quelqu’un qui maîtrise bien son sujet. De plus, un arc droit peut être fabriqué avec quelques notions, n’importe où, et avec très peu d’outils. Ce n’est pas le cas de l’arc à courbure. Non seulement il demande du temps, mais il nécessite davantage de connaissances et utilise plus de matériaux. La préparation de tendon, de la colle, leur application sur l’arc sont des opérations très consommatrices de temps. De plus, les tendons et la colle craignent l’humidité, ce qui n’est pas pour plaire le chasseur. En outre, souris, chiens et insectes apprécient également les qualités du tendon, mais pour d’autres raisons que celles du facteur d’arc.

Choix du profil

Il est maintenant temps de choisir le profil de l’arc à construire. Plusieurs paramètres vont entrer en ligne de compte et le choix va se faire en fonction du bois dont on dispose (de ses qualités techniques), de la puissance que l’on souhaite atteindre, de la vitesse recherchée et de la taille maximale que l’on veut donner à l’arc. De là dépend, le degré de courbure, la longueur de ces courbures, la précision de l’arc. Toutes ces données sont intimement liées.

Je vais prendre pour exemple l’arc dont je décris la construction dans ce chapitre, et exposer les raisons qui m’ont conduit à déterminer ses dimensions.

Je cherchais à fabriquer un arc dont la vitesse de la flèche serait équivalent à un flatbow de 60 livres. Compte tenu des données décrites ci avant, je choisissais de fixer la puissance de mon recurve 20 % au-dessous de 60 livres, soit 50 livres. Le bois dont je disposais était du frêne. Mesurant la largeur moyenne de mes flatbow réalisés dans cette essence, soit 2 pouces, je décidais d’augmenter cette largeur à 2 pouces ¼. Je retirais par sécurité 5 livres sur les 50 trouvés précédemment. Pour déterminer la longueur de l’arc, je tenais compte du fait que j’utilisais un bois de performance moyenne, et je choisissais de ne pas réaliser un arc trop court, sans excéder 64 ou 65 pouces (longueur au-delà de laquelle le tendon alourdit inutilement les branches). Je choisis 60 pouces, de façon à obtenir des branches assez légères et profiter au maximum de l’efficacité du design, et aussi pour défier un recurve de ma connaissance en bois lamellé collé et fibre de verre. De là, je tirais la longueur des courbures que je fixais à 25 % de la longueur totale de chaque branche (longueur prise entre l’extrémité de la branche et le tout début de la courbure, en vue d’arriver à une longueur de contact corde/arc d’au moins 15 % lorsque l’arc sera bandé). J’optais pour un angle de courbure classique, soit 60°. Enfin, je choisis d’appliquer du tendon sur 1/3 de chaque branche, au niveau de la courbure et non sur la totalité des branches. En effet, un arc de 60 pouces large de 2 pouces ¼ aurait consommé trop de tendon à mon goût. Ceci aurait eu tout d’abord pour effet de vider mon stock de tendon durement acquis, de me prendre un temps infini pour l’appliquer et finalement d’alourdir significativement les branches. Je choisis donc de recouvrir le reste des branches avec de l’écorce de merisier. C’est un matériau très résistant, plus léger que le tendon et plus rapide à appliquer.

A vous de faire votre choix, en fonction de vos besoins et du bois dont vous disposez. Si vous utilisez de l’if, vous pourrez réduire la largeur et la longueur de l’arc. Si vous utilisez de l’érable il vous faudra les augmenter.

 

Emmanuel Martin libérant les nombreuses heures passées à fabriquer son arc.

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Construction

La première chose à prévoir dans la construction d’un arc à courbure, c’est du temps ! Prenez le nombre d’heures qu’il vous faut pour fabriquer un flatbow et multipliez par 2 ou plus souvent par 3. Mais, la première fois que vous armerez votre recurve, que vous sentirez les courbures jouer leur rôle de cames, que la flèche s’envolera comme une fusée, vous serez prêt pour commencer votre deuxième recurve. La figure suivante vous donne toutes les dimensions dont vous avez besoin pour construire l’arc que j’ai décrit ci-dessus.

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Dimensions : D’une longueur totale de 60’’, les dimensions de cet arc permettent d’obtenir un recurve aux performances intéressantes. L’angle que forme la courbure avec la branche est de 60° (ou 120°). La longueur de cette courbure est de 7’’ ½, soit 25 % de la branche.

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La billette de bois que vous utiliserez aura une longueur de 65 pouces et une largeur de 2 3/8 de pouces. Ces dimensions vous permettront d’arriver en toute sécurité aux dimensions de l’ébauche de l’arc, soit 60 pouces et 2 pouces 1/4.

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Billette : les dimensions indiquées ici concernent une billette en frêne. Si vous utilisez de l’if la largeur pourra être réduite d’1/4 de pouce.

Taillez votre arc, sa poignée et désépaississez-le de la même manière que pour un flatbow, et obtenez une épaisseur de ½ pouce à l’extrémité des branches, et de ¾ de pouce près de la poignée. En fait, tout se passe comme pour un flatbow jusqu’à l’étape dufloor tillering. La seule différence, c’est qu’il faudra laisser aux branches leur largeur sur toute la longueur. Il est en effet très prudent de ne pas réduire les extrémités des branches à leur profil final avant de les avoir recourbées. Lors de l’opération qui donnera la courbure, les branches peuvent se tordre légèrement. Si la billette a déjà été affinée, il y a un risque pour que les futures poupées ne soient pas dans l’axe central de l’arc, et qu’ainsi la corde ne passe pas exactement à la verticale de la poignée. Garder aux extrémités toute leur largeur permet de réaliser plus facilement une courbure avec le même angle sur toute la largeur des branches. De plus, ceci permet d’ajuster plus tard la largeur lors de la phase de tillering, ce qui peut être un avantage pour une éventuelle correction.

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Ébauche : Les branches resteront dans leur plus grande largeur (ici 2’’ ¼) pendant toute la phase de courbage, y compris à l’extrémité des branches.

Commencez la phase de floor tillering jusqu’à ce que les deux branches courbent légèrement. Ne retirez pas de bois sur les 10 derniers pouces et laissez-les à un minimum de ½ pouce. Il est important d’obtenir à ce stade une épaisseur minimum qui facilite l’opération de courbage sans retirer trop de bois afin de garder la rigidité de la future courbure.

Courbage des branches

Comme je l’ai indiqué ci-dessus, la courbure portera sur 25 % de chaque branche (avant que l’arc ne soit bandé), soit environ 7 ½ pouces pour le modèle qui nous occupe. L’angle recherché est de 60° par rapport au plan de l’arc. Pour atteindre cette courbure de 60°, il va être nécessaire de faire plier la branche de 10 à 20° supplémentaires, soit 70 à 80°. En effet, il faut dores et déjà prendre en compte une déperdition naturelle qui se manifestera lors des premiers armements et qui ramènera l’angle aux environs de 60°.

Pour courber une branche, plusieurs façons de faire sont possibles. Mais quelle que soit la méthode employée, la règle suivante reste toujours vraie : plus un bois est chauffé longtemps, en une ou plusieurs fois, plus il devient faible. En effet, la chaleur altère les propriétés mécaniques du bois. Appliquée avec excès, elle rend le bois aussi malléable que du carton. C’est pourquoi il est important que les branches soient les plus fines possibles à l’issue du floor tillering. Plus la branche sera mince, moins longtemps elle aura besoin de chauffer, moins elle s’affaiblira.

Il faut tout de même laisser une épaisseur minimale, ne serait ce que pour terminer le tillering, mais aussi parce qu’à l’issue du courbage, la surface du ventre peut présenter des éclats de bois ou se fissurer à l’endroit de la courbure malgré les précautions qui auront été prises. D’autre part, il ne faut pas perdre de vue que les courbures resteront fermes à l’armement et que pour cela, elles ne doivent pas être trop minces.

Courbage par chaleur sèche

C’est la méthode la plus naturelle, mais aussi la plus risquée. Je la déconseille pour un courbage qui vise à recourber les branches au-delà de 30°. Elle est également moins recommandée pour les recurves dont la courbure reste ferme à l’armement, puisque le bois est plus épais et donc plus difficile à plier. Toutefois, pour le modèle dont je décris plus particulièrement la construction, son principe pourra servir lors de la phase finale du tillering. Cette méthode consiste à chauffer le bois par application d’une source de chaleur directement sur la partie à courber et à plier le bois sur son genou par exemple. Pour cela, on peut utiliser l’ancienne méthode des indiens Modoc qui appliquaient des pierres chaudes et de la mousse sur la branche. On peut également approcher la branche auprès de braises chaudes, comme je l’ai vu faire par les Wayanas de Guyane pour redresser leurs arcs. Des moyens plus modernes existent bien sûr. La gazinière de la cuisine, les résistances électriques d’un four ou d’un grill. Personnellement, ma préférence, en dehors des moyens traditionnels, va aux résistances électriques d’un four, surtout lorsque l’on débute dans le métier. En effet, le plus grand danger lors de la courbure d’une branche par chaleur sèche est de la transformer en charbon de bois. J’évite toute flamme en utilisant le four électrique familial. Pour empêcher le bois de noircir malgré tout (et ceci est surtout vrai pour les « bois blancs ») j’enduis copieusement la partie de la branche à courber avec du suif, une graisse animale qui protège mieux qu’une graisse végétale.

L’idée est de faire pénétrer lentement la chaleur dans le bois, et pas seulement en surface. Il ne faut donc pas coller la branche à la source de chaleur, mais la maintenir à une certaine distance (en fonction de l’intensité et du risque de carbonisation) pour laisser le bois s’échauffer peu à peu, aider en cela par le suif qui devient liquide et pénètre le bois. Il faut donc que la source de chaleur ne soit pas réglée sur une température très élevée. Si vous possédez des chutes du bois avec lequel vous avez fabriqué votre arc, faites des essais avant de passer à du sérieux.

Vous voilà fin prêt. L’une de vos branches est enduite de suif côté ventre et côté dos. Vous avez pris soin de faire une petite marque à l’endroit où vous allez plier le bois, déterminant par là, la longueur de votre future courbure. Le four électrique, par exemple, est allumé thermostat 3 ou 4 (assez faible). Munissez-vous de gants et d’un linge pour protéger votre genou. C’est lui qui servira d’appui pour plier le bois. Approcher la branche de la résistance électrique et la maintenir à environ 3 cm (15 cm si la source de chaleur est une flamme. Faîtes des essais !). Attendre 2 minutes, retourner la branche et l’appliquer de la même manière pendant 2 nouvelles minutes. Surveillez sans arrêt la surface du bois afin de détecter tout début de carbonisation. Retirez la branche. Testez contre votre genou la résistance. Ne forcez pas, vous sentirez tout de suite si le bois cède ou ne cède pas. S’il ne plie pas, recommencez l’opération de chauffage pendant 1 à 2 nouvelles minutes et ainsi de suite jusqu’à ce que le bois cède. Procédez lentement. N’essayez pas d’arriver rapidement au résultat. Soyez patient. L’aspect de la surface est un excellent guide. En général j’attends que la graisse émette quelques bulles avant d’essayer de faire plier le bois.

Dès que vous sentez que le bois cède, pliez la branche de quelques degrés, jusqu’à ce que vous sentiez une résistance. Maintenez la branche dans cette position pendant environ 30 secondes à 1 minute, le temps que le bois se refroidisse.

Procédez de cette manière jusqu’à obtention du degré de courbure désiré. Vérifiez ensuite que l’extrémité de la branche est toujours dans l’axe de l’arc. Si ce n’est pas le cas, chauffez-la de nouveau et redressez-la. Faites de même pour l’autre branche. Comparez-la avec la première et ajustez l’une ou l’autre jusqu’à obtention de courbures homogènes. Lors de la finition, vous serez peut-être amené à réchauffer l’une ou les deux branches si la corde ne passe par le centre de l’arc ou si les branches se tordent.

Il faut savoir que cette méthode donne des résultats assez inégaux d’une essence de bois à une autre. Elle fonctionne assez mal pour le frêne, par exemple, lorsqu’il est épais de ½ pouce.

Courbage par chaleur humide

Cette méthode est à préconiser pour réaliser de fortes courbures (supérieures à 30°), ainsi que pour celles effectuées sur des branches épaisses en vue d’obtenir un arc dont les courbures restent fermes à l’armement.

La méthode que je décris ici consiste à plonger la branche dans un bain d’eau bouillante et à la faire plier à l’aide d’une forme. Il est également possible d’employer de la vapeur pour chauffer la branche à plier, mais je ne l’ai personnellement jamais expérimenté.

Faire bouillir est un moyen moins risqué. Il est plus doux.

La première étape consiste à fabriquer une forme. Elle doit avoir les dimensions qui vous permettront d’obtenir l’angle et la longueur de courbure recherchée. Celle que j’ai employée pour cet arc formait un angle de 90 ° avait une longueur d’environ 25 cm et était un peu plus large que les branches. Pour mieux épouser le dos de l’arc et faciliter sa mise en place pendant le doux moment d’euphorie du courbage, je l’avais légèrement creusée avec une gouge afin de la rendre concave sur la face en contact avec l’arc. Elle doit présenter un angle supérieur au degré de courbure souhaité, le bois se détendant toujours lorsqu’on desserre les serre-joints. On tient compte d’une détente du bois lors des premiers armements. Il vous faut également employer une lame d’acier flexible de la largeur de la branche et d’une longueur de 30 centimètres au moins. Cette lame d’acier sera appliquée contre le ventre de l’arc sur la partie à courber dans le but de comprimer le bois et d’éviter ainsi que des éclats de bois ne se détachent. Pour ma part, j’emploie une règle de tapissier dont la souplesse me sert également à tracer le profil de mes arcs. Elle sera coincée avec les 5 serre-joints qui vous seront nécessaires.

La principale difficulté est de trouver un récipient suffisant pour accueillir cette espèce de sabot coincé au bout d’un grand ski, avec des tiges de métal qui dépassent de partout. Il faut un récipient qui soit à la fois profond et large. J’ai la chance d’en posséder un installé au-dessus d’un foyer dans une vielle buanderie qui n’a pas vu de lavandières depuis plus de 40 ans. La meilleure solution peut être un vieux fût de 200 litres coupé en deux et bien dégraissé (attention au produit qu’il pouvait contenir, il était peut être toxique ou pourrait altérer le bois !). Mais il y a sûrement d’autres solutions à inventer.

Vous avez placé votre forme et votre lame d’acier à l’extrémité de l’arc à l’aide d’un premier serre-joint. L’eau commence à être assez chaude. Plongez le tout dans l’eau. Le bois va ainsi chauffer en même temps que l’eau, ce qui lui évitera de se craqueler par un choc thermique. Arrivé à ébullition, attendre au moins 30 minutes suivant l’épaisseur de la branche. La règle est de laisser le bois 30 minutes par ½ pouce d’épaisseur lorsque l’on va lui faire subir un courbage si important. Retirer l’arc à l’aide de gants. Attention ! Vous avez au maximum 30 secondes pour agir. Dépasser ce temps, le bois reprend sa raideur naturelle. Placer un deuxième serre-joint à quelques centimètres du premier et commencer à serrer jusqu’à sentir une résistance. Replonger l’engin dans l’eau bouillante et attendre 10 minutes. Sortir et serrer le deuxième serre-joint. Recommencer l’opération jusqu’à ce que le deuxième serre-joint soit complètement serré. Puis faites de même avec le troisième puis l’éventuel quatrième serre-joint qui sera placé quant à lui à l’extrémité de la forme. Attendre 24 heures avant d’enlever la forme et plusieurs jours avant de mettre la branche sous tension.

Pendant tout ce travail, il faut surtout arrêter de serrer dès que l’on sent que le bois n’est plus sous l’influence de la chaleur, sinon on risque d’éclater le bois, de le fendre ou bien encore de le transformer en papier carton.

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Forme : La forme, placée à l’extrémité de la branche à l’aide d’un serre-joint, a bouilli pendant 30 minutes. Un second serre-joint est placé près du premier et serré de quelques centimètres. La branche commence à courber. Après chaque bain de 10 minutes, vous avez 30 secondes au maximum pour agir. Puis un troisième et enfin un quatrième serre-joint sont placés au fur et à mesure que la courbure progresse. Notez la présence de la lame d’acier maintenue par le premier serre-joint et par un cinquième qui n’apparaît pas sur cette photo.

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Rappelez-vous aussi, que plus le morceau de bois aura besoin d’être plongé dans l’eau bouillante, plus il deviendra faible par la suite. Vous risquez ainsi d’obtenir de jolies courbures qui s’effaceront à la première prise de corde ou qui plieront exactement en sens inverse, transformant votre arc en jouet, en souvenir, ou en petit bois pour allumer le feu. Soyez donc méticuleux afin d’obtenir votre courbure en quatre à cinq bains. Mais ces chiffres sont indicatifs, ils peuvent varier d’un bois à un autre, d’une essence à une autre.

Cette remarque est également vraie pour la courbure par chaleur sèche. Courber l’autre branche de la même manière, en prenant soin de lui donner un angle et une longueur de courbure identiques à la première.

Vous pouvez maintenant dessiner et tailler l’extrémité des deux branches afin de leur donner leur forme définitive. Personnellement, je maintiens les branches dans leur plus grande largeur (ici 2 ¼ pouces) jusqu’à un point situé un peu avant la base de la courbure. La largeur à l’extrémité de la branche est de ¾ de pouce.

Renforcer le dos de l’arc

C’est maintenant une étape assez longue qui vous attend. Reportez-vous au chapitre qui traite du « backing ». Que ce soit dans le séchage des tendons, leur préparation, leur application et la colle utilisée, il n’y a pas de particularité liée au recurve. Toutefois, après avoir essuyé quelques décollements intempestifs de tendon, je conseille de placer des tendons enduits de colle autour de la branche à l’endroit de la courbure. Ceci aidera le backing à résister à la forte extension qui lui sera demandé. Rappelez-vous aussi que le tendon et la colle sont 2 fois plus lourds que le bois et qu’il existe d’autres matériaux pour remplacer le tendon. Trois à quatre couches de tendon sont nécessaires.

Tillering

La phase du tillering peut maintenant débuter à proprement parler. Votre expérience en matière de tillering sur les longbow va être ici très utile. Ménagez-vous du temps pour cette phase et essayez de ne pas être dérangé. Commencez par retirer du bois sur toute la longueur des branches, en obtenant un profil idéal, aux épaisseurs qui tendent à se rapprocher des épaisseurs finales. Retirez également du bois sur les courbures et les poupées. Elles peuvent présenter des éclats de bois ou de petites fentes à l’issue du courbage qu’il convient de faire disparaître. Il faut être extrêmement attentif à ne pas trop vous attarder à l’endroit exact de la courbure. En effet, ce point fait saillie et si vous utilisez une râpe, il sera plus vulnérable.

N’allez pas trop vite et mesurez régulièrement l’épaisseur sur toute la courbure afin de ne pas dépasser les dimensions auxquelles vous souhaitez arriver. Vérifiez la courbure en floor tillering (en coinçant la branche avec votre pied).

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Profil final : Voici les épaisseurs de 6’’ en 6’’ du profil final d’un arc à courbure en frêne. La courbure est épaisse de 11/32’’ sur presque toute sa longueur, ce qui lui permet de conserver sa rigidité pendant l’armement (recurve statique). Au niveau de la poupée, elle est plus épaisse avec 7/16’’.

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Comparez avec les arcs que vous avez déjà réalisés, et vous saurez si votre arc est très loin de la phase finale de tillering ou si vous pensez en être au début. Dès que vous le jugez possible, utilisez la longue corde de tillering. Pour ma part, je ne taille pas les coches à ce stade. Je bloque les anneaux de la corde à l’aide de ficelles entourées autour de l’extrémité des branches. Ceci m’évite d’interrompre la phase de tillering pour tailler rapidement des coches qui se révéleront par la suite excentrées ou sans symétrie du fait de ma hâte à reprendre le tillering.

Placez la barre de tillering et tendez la corde. Essayer de faire courber l’arc de quelques pouces. Si cela n’est pas possible, continuez à retirer du bois. Si vous y arrivez, vous allez tout de suite vous apercevoir si les 2 branches sont dans le même axe ou pas. Si elles ne le sont pas (ce qui est le cas en général), la plus faible ou la plus excentrée va se tourner sur elle-même, au point que si vous tirez davantage sur la corde, la branche va complètement décaler cette dernière hors de la largeur des branches. Il convient bien sûr de stopper immédiatement la traction. Les raisons de cette réaction sont simples. Le bois courbe davantage là où il est le plus faible. En effet, malgré les soins apportés il se peut très bien que lors de la phase de courbage des branches, l’une d’elles ou les deux n’aient pas courbé avec le même angle sur toute la largeur. Il est également possible que, sur le ventre de l’arc, vous ayez involontairement retiré plus de bois sur un des deux bords, et qu’ainsi la branche se mette à twister. Par ailleurs, il peut exister une faiblesse dans le bois qui se révèle à ce moment.

Replacez l’arc sur la barre de tillering et faites un nouvel essai. Si tout va bien, vous pouvez cette fois-ci armer l’arc de plusieurs pouces et accrocher la corde à un cran de la barre sans que l’arc ne se voile. Sinon, vous devez de nouveau corriger la branche en la chauffant.

La phase de tillering ne peut alors continuer. Il faut redresser la branche fautive. Rassurez-vous, cela arrive souvent et vous pouvez très bien avoir à redresser 4 ou 5 fois une branche au cours du processus de tillering, puisque au fur et à mesure que vous retirez du bois, vous modifiez l’épaisseur des branches et donc leur courbure.

Pour redresser la branche fautive, c’est tout simple. Pas de panique. Vous n’aurez pas besoin de retirer tout le tendon et de refaire une séance d’eau bouillante (comme je l’ai tristement expérimenté dans un premier temps), il suffit d’employer la méthode de la courbure par chaleur sèche que j’ai décrite ci-dessus. N’ayez crainte pour votre tendon. Seul le ventre sera chauffé, et la chaleur n’aura pas d’effet sur le dos de l’arc.

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Tillering : La courbure fait saillie. Attention à ne pas trop s’attarder sur ce point plus vulnérable. Effectuer quelques passages avec la râpe, puis contrôler l’épaisseur à l’aide pied à coulisse. La râpe que j’utilise est une râpe de maréchal ferrant (merci Didier Lefebvre), dont la largeur et la forme des dents sont particulièrement utile pour le tillering.

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Les règles sont les mêmes que pour le courbage par chaleur sèche. Mais attention pendant cette opération à ne pas chauffer la partie courbée. Il convient de se concentrer sur celle qui se trouve 5 à 15 centimètres avant la courbure afin de ne pas voir cette dernière disparaître. Après avoir enduit le ventre de l’arc à l’aide de suif, réglez votre four (si vous utilisez comme moi un four électrique) sur le thermostat 3 ou 4. Maintenez le ventre de l’arc à 3 ou 4 centimètres de la résistance pendant 2 minutes, puis 2 nouvelles minutes si cela n’est pas suffisant. Il faut chauffer juste assez pour plier le bois, mais pas plus, sinon le tendon peut être endommagé. Prendre la branche entre ses deux mains et la tordre dans le sens de rotation opposé au voilement qu’elle présentait lors de l’armement sur la barre de tillering. Maintenir ainsi pendant 30 secondes jusqu’à ce qu’elle refroidisse et jugez si la correction infligée est suffisante au regard du voilement observé à l’armement. Laissez le bois retrouver une température normale.

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Procédez maintenant exactement de la même manière que vous le faites avec un longbow, tout en gardant une épaisseur suffisante au niveau de la courbure afin de lui conserver une rigidité.

Au fur et à mesure que vous retirerez du bois, que vous pèserez la puissance de votre arc, que vous le placerez sur la barre de tillering pour vérifier l’harmonie de la courbure des 2 branches, il pourra arriver que l’une d’elle se mette à twister comme décrit précédemment. Vous reprendrez ainsi autant de fois le chemin de la cuisine puis celui de l’atelier, jusqu’à obtenir la puissance recherchée (+3 ou 4 livres qui disparaîtront pendant la finition), une courbure harmonieuse et des branches qui reculent exactement dans l’axe central de l’arc à pleine allonge. Peu importe que les branches de votre arc semblent tordues ou voilées lorsqu’il n’est pas bandé. L’important, c’est que l’alignement soit parfait quand la corde est en place et quand vous armez votre arc.

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Puissance et courbure : Après avoir redressé 4 fois le voilement des branches, je contrôle leur déformation pour m’assurer qu’elles ne tournent pas sur elles-mêmes, tout en mesurant la puissance à l’aide d’un pèse-personne.

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Une fois que votre arc a trouvé cette harmonie, bandez-le à 6 ou 7 pouces et armez-le une dizaine de fois. Encochez une flèche et détendez-vous. Si tout va bien vous serez gagné par la douceur de l’armement et surpris par la vitesse de la flèche. Il est également possible que vous explosiez de joie.

Après 20 flèches, contrôlez de nouveau la courbure, la puissance et l’axe de la corde par rapport à celui de l’arc. Pour la finition, je conseille mille fois de vernir votre arc. Colle et tendon étant très sensibles à l’eau et à l’humidité ambiante, il serait létal pour l’arc de les voir retrouver leur texture blanche et pâteuse. Dès que j’emploie du tendon dans la fabrication d’un arc, je n’hésite pas à appliquer 10 couches de vernis. Je le mets régulièrement au soleil et j’évite de l’emmener à la chasse par temps de pluie.

Je vous souhaite autant de plaisir que j’ai pu en avoir le jour où mes premières flèches se sont envolées de mon premier arc à courbure. Beauté des formes, vitesse et noblesse sont au rendez-vous. A vous de jouer !

 

 

 

LES FLÈCHES

Introduction

Les puristes fabriquent eux-mêmes leurs flèches de manière primitive. C’est un travail intéressant, relativement difficile et surtout très long. Sans vouloir être pessimiste si vous avez déjà eu du mal à réaliser votre arc ne cherchez pas à réaliser vos flèches de manière primitive. La fabrication va pour ces puristes jusqu'à tailler dans la pierre les pointes de flèches. Il est plus courant de rencontrer des archers qui taillent leurs empennes dans des plumes d’aile ou de queue de dinde. L’empenne est le nom donné à une plume taillée pour une flèche.

Pour ma part j’achète les fûts de bois, les pointes, les plumes, les encoches et me contente d’en réaliser l’assemblage. Cette année j’ai acheté un emporte-pièce pour tailler mes empennes et j’attends les fêtes de fin d’année pour récupérer quelques belles plumes de dinde et d’oie. Sur les arcs simples on est obligé d’utiliser des plumes naturelles car ces arcs sont dépourvus de repose flèche laissant passer les plumes semi-rigides en plastique. Vous trouverez facilement trois diamètres de fût (5/16, 11/32 et 23/64 de pouce) chez votre marchand favori. En plus de son diamètre le fût est aussi calibré par sa flexibilité ou spine en anglais. Cette flexibilité est donnée par une fourchette de poids en livres, par exemple 50-55 livres. Cette fourchette veut dire que le fût aura une flexibilité adaptée à un arc d’une force comprise entre ses deux extrémités à une allonge de 28 pouces. Attention ces valeurs sont données pour des arcs modernes et ne sont pas valables pour les arcs simples tels que flatbows et longbows anglais. En effet sur les arcs modernes la flèche passe pratiquement au milieu de l’arc grâce à la fenêtre d’arc. Ce n’est pas le cas pour les arcs simples pour lesquels la flèche est largement déviée par la poignée. Il vous faudra tenir compte de cette différence et utiliser des fûts plus souples de 5 à 10 livres que la force de l’arc. Par exemple utilisez un fût d’un spine de 45-50 si votre arc pèse 55 livres.

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La figure A montre l’angle que fait la flèche avec l’axe du déplacement de la corde sur un longbow anglais. La figure B montre que l’angle est pratiquement nul sur un arc moderne. Cette différence met en évidence la nécessité d’utiliser des flèches plus souples si on ne veut pas que les flèches tirées avec un longbow ou flatbow (Selfbow) partent à gauche de la cible.

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Le spine d’un fût est fonction de la nature du bois et aussi de son diamètre. Couramment un diamètre de 5/16 conviendra à des forces d’arcs jusqu’à 45/50 livres, 11/32 à des forces jusqu’à 60/65 livres et 23/64 à des forces supérieures à 65 livres.

Une autre information importante est la relation entre la force de l’arc et le poids minimum de la flèche. 6 grains par livre de puissance de l’arc est la valeur minimale. En dessous de cette valeur c’est un peu comme si l’on tirait l’arc à vide. Par exemple un arc de 50 livres tirera une flèche d’un poids minimum de : 50 fois 6 grains donc 300 grains soit environ 20 grammes.

La qualité de la flèche est plus importante que la qualité de l’arc. En d’autres mots vous pouvez avoir de bons résultats avec un arc de qualité moyenne et de bonnes flèches alors qu’il est très difficile d’obtenir des performances avec un bon arc et de mauvaises flèches.

Voici quelques conseils pour vous aider à choisir vos fûts. Personnellement je monte mes flèches par 6 ou 12 et il est indispensable qu’elles respectent les mêmes critères. Il y a pour moi quatre facteurs principaux qui sont par ordre d’importance : le spine, la rectitude, le sens des fibres et le poids.

Le spine

Il est indispensable d’avoir dans le même lot de fûts le même spine. Cela peut paraître évident mais ce n’est pas si facile. Les fûts sont livrés aux magasins triés par spine de 5 en 5 par exemple 45-50 ou 50-55. En confiance ces commerçants vous les revendent suivant le spine marqué. Ils se trompent et ils vous trompent comme ils ont été trompés. Sur une série de 12 fûts si vous les passez dans un appareil de mesure de spine vous pouvez trouver au mieux 10 fûts au spine annoncé et au pire 4 ou 5. Choisissez donc d’achetervos fûts chez un commerçant qui possède un appareil de mesure de spine.

La rectitude et les fibres

Ces deux facteurs vont de paire. La rectitude se contrôle facilement en faisant rouler les fûts sur une surface plane. Si ça tourne rond c’est bien mais cette méthode permet seulement d’éliminer les trop mauvais fûts. Maintenant regardez de près ceux qui tournent rond et ceux qui ne tournent pas trop mal. Les bons fûts sont ceux qui ont les fibres du bois (les cernes de croissance) rectilignes et parallèles à l’axe longitudinal du fût. En effet le bois est une matière vivante ce qui veut dire que le bois bouge avec le temps. Si les fibres sont bien droites et parallèles vous aurez plus de chances que vos fûts restent droits avec le temps. Ne rêvez pas le fût parfait n’existe pas et il est facile de corriger par simple torsion les petits défauts de rectitude.

Le poids

Il y a de fortes différences de poids entre les fûts en bois, bien qu’ils soient de même longueur et de même diamètre. L’archer averti sélectionne aussi ses fûts par leurs poids. Bien peu de commerçants contrôlent le poids de leurs fûts, du reste cette opération ne peut être réalisée efficacement seulement après leur mise à votre allonge.

En conclusion, je dirai que si vous trouvez un commerçant qui a un spine testeur et qui vous laisse sélectionner vos fûts, et si en plus vous voulez les trier par poids, vous serez obligé de les acheter par 50 ou 100, de les mettre à longueur et de les trier ensuite par poids.

Pensez bien quand vous montez vos flèches que les cernes des fûts devront être perpendiculaires à l’axe de la corde. Vous devez donc faire attention à ce facteur lors du passage des fûts au spine testeur. Certaines essences ont des résistances qui varient de 10 à 15 livres suivant l’orientation des cernes.

 

L’orientation de cernes du fût des flèches doit être perpendiculaire à l’axe de la corde.

Le cresting

Tirer les flèches de tout le monde ne vous conviendra sûrement pas si vous avez passé des heures à réaliser votre arc. En français le mot cresting se traduirait par le marquage de ses armoiries. Il est utilisé maintenant pour l’action de personnaliser les flèches à l’aide d’anneaux de couleur sur les fûts. Cette méthode était pratiquée par les Indiens d’Amérique qui, par ces couleurs, définissaient l’appartenance à la tribu le propriétaire. L’indien conservait tout au long sa vie les mêmes signes sur ses flèches. Les archers contemporains eux pour reconnaître leurs flèches lors des concours utilisent les couleurs des plumes et des encoches. Le cresting est principalement utilisé de nos jours par les tireurs de fûts bois.

Les fûts bois ont un défaut qui peut être du reste facilement corrigé, ils ne résistent pas bien à l’humidité. La solution, bien sûr, est de ne jamais sortir ses flèches par temps pluvieux ou humide, mais le remède évident est de les recouvrir de vernis ou d’un produit hydrofuge. Cette couverture ajoute, en plus de la résistance à l’humidité, un toucher beaucoup plus agréable aux flèches. Certains utilisent des vernis brillants passés par trempage ou par plusieurs couches au pinceau. Pour ma part, je trouve que cela donne un aspect plastique et synthétique ne respectant pas le bois. D’autre part, la qualité du vernis devient très importante pour ces couches épaisses car, par exemple, dans les cibles en paille compressée des fragments de paille colle à la plupart des vernis. Les goûts et les couleurs ça ne se discute pas, je préfère les meubles cirés aux meubles vernis.

Vous avez devant vous votre série de fûts, si leur surface n’est pas bien lisse un petit passage au papier de verre très fin est nécessaire. L’étape suivante consiste à coller l’encoche d’un côté du fût, préalablement taillé à l’aide d’un petit outil spécial ressemblant à un taille-crayons. Vous trouverez là encore cet outil dans votre magasin favori ouun archer vos prêtera le sien. La colle vous la trouverez aussi dans les magasins spécialisés. Une fois toutes vos encoches collées coupez vos fûts à votre allonge. Puis taillez le cône qui recevra la pointe de flèche. Pour ma part, je fixe les pointes, après les avoir dégraissées par trempage dans du trichlorethylene, avec une colle du style Araldite. Le dégraissage est impératif pour les pointes de flèches noires car ce brunissage est réalisé par trempage des pointes chauffées dans de l’huile froide. Sans ce dégraissage vous perdrez vos pointes dans les cibles en paille compressée ou en matériaux durs. Puis à l’aide d’une paille de fer très fine polissez bien vos fûts puis dépoussiérez-les en les frottant avec un chiffon propre et doux. Vos fûts sont maintenant prêts à être décorés.

Il va vous falloir un peu de matériel. Mon équipement est très simple et peu coûteux. Il se compose de quelques tubes de couleurs (peinture acrylique) et d’un pinceau fin achetés dans une boutique de beaux-arts. Reste le problème de faire tourner le fût pour peindre des anneaux de couleurs le plus régulièrement possible. Mon premier montage fut réalisé en 10 secondes en fouillant dans la boîte de LEGO de mon fils. Trois roues montées en quinconce sur une plaque et mes fûts posés dessus tournaient facilement. Ce montage est plein d’avantage mais la mise en rotation du fût ainsi que son maintien sur les roues occupent pleinement une main.

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Un simple montage de LEGO permettant de faire tourner le fût pour le cresting. Si vous trouvez plus simple, c’est que vous n’avez pas de LEGO à portée de main.

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Mon deuxième montage est en gros une copie des machines spécialisées que l’on trouve aux USA ou difficilement en France, mais qui, de par leur prix, sont réservées aux professionnels ou à une élite. Ces machines sont très simples et composées d’une planche sur laquelle est fixé à une extrémité un moteur qui entraîne l’encoche de la flèche et de l’autre une pièce en forme de V qui supporte son extrémité.

Le problème est de trouver un moteur qui tourne à la bonne vitesse. Pas de problème vous trouverez ce type de moteur dans les rayons des magasins vendant des barbecues. Ces petits moteurs à pile, qui du reste sont peu efficaces pour faire tourner un poulet, sont parfaits pour faire tourner vos flèches. Il ne reste plus qu’à tailler un petit bout de bois carré d’un côté, pour se coincer dans le réceptacle du moteur prévu pour la broche, et en forme de tournevis plat de l’autre pour se coincer dans l’encoche de la flèche. Fixez le moteur d’un côté de la planche et ajustez un support en V à l’autre extrémité de la planche afin de maintenir la flèche dans l’axe du moteur.

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Montage très efficace pour le cresting utilisant un moteur à pile de tourne broche (barbecue) fixé sur une planche. La flèche repose de l’autre côté sur un support en forme de V.

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Montez un fût dans votre machine il ne vous reste plus qu’à être créatif en réalisant des bagues à vos couleurs avec votre petit pinceau. Certains se servent des couleurs pour identifier le spine de leurs flèches. Par exemple des bagues rouges et bleues pour les spines de 45/50 bleus et jaunes pour 50/55 et ainsi de suite suivant vos goûts. Une fois toute votre série peinte, laissez sécher une demi heure. L’acrylique sèche très vite même trop vite, donc ne sortez pas trop de peinture de vos tubes. Avant de vernir vos fûts vous pouvez en teindre tout ou partie en utilisant des teintures à bois.

Pour ma part, j’aime conserver la couleur du bois. Avec un pinceau à poils souples passez une couche d’un vernis d’extérieur sur toute la longueur du fût. Le lendemain, polissez vos flèches avec de la laine de fer très fine. Si l’état de surface n’est pas assez beau ou que le bois a absorbé complètement votre vernis, repassez simplement une autre couche de vernis et le lendemain repassez vos fûts à la laine de fer. Cette méthode ne vous donnera pas des fûts brillants, elle vous donnera des flèches polies respectant la nature du bois et résistantes à l’humidité.

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Quelques exemples de cresting, c’est sûr c’est bien plus beau en couleur.

Il ne vous reste plus qu’à coller l’empennage et vos flèches seront obligées d’atteindre leur but ou presque. Coller les plumes, oui! Mais comment ?

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L’empennage

Les plumes naturelles, aussi appelées empennes, que l’on utilise pour les flèches et que vous trouverez chez les marchands sont taillées dans les plumes des ailes. Elles proviennent le plus souvent de dindons et d’oies. Les oiseaux ont deux ailes donc vous trouverez des empennes de plumes d’ailes droites et empennes de plumes d’ailes gauches. Vous devez penser que je délire avec mes oiseaux à deux ailes, mais en France très peu de commerçants font la différence. Si vous achetez des plumes aux USA 95% des commerçants vous demanderont : droite ou gauche ? Pourquoi cette différence ? Il y a deux façons pour monter les plumes sur les flèches. Elles sont collées soit parallèlement au fût soit en hélice. Si vous montez des plumes d’aile droite parallèlement au fût quand votre flèche volera, elle aura tendance à tourner sur elle-même dans le sens des aiguilles d’une montre. Donc si vous montez vos plumes droites en hélice, cette hélice devra être à droite. Si vous êtes gaucher l’hélice à droite vous donnera de meilleurs résultats. Ceci ne vient pas d’une observation personnelle mais est un lieu commun aux USA.

üSouvenez-vous : Pour les droitiers plumes d’ailes gauches et si montées en hélice utiliser l’hélice à gauche.

üPour les gauchers plumes d’ailes droites et si montées en hélice utiliser l’hélice à droite.

Vous reconnaîtrez une plume gauche en la plaçant perpendiculairement à la ligne de vos épaules pointe en avant, le rachi dépasse sur la base de la plume à droite. Pour une plume droite et dans la même position le rachi sera sur votre gauche. Pour les arcs simples je préfère monter mes plumes en hélice car ce type d’empennage redresse plus vite la trajectoire de la flèche. Côté matériel là, vousn’y coupez pas il vous faut acheter ou vous faire prêter une empenneuse.

 

A gauche, sur la photo, exemple d’un empennage en hélice à droite et à droite, d’un empennage à gauche.

 

 

LES ARCS DU MARY ROSE

Voyage dans le passé

Si vous allez en Angleterre et plus particulièrement à Portsmouth, vous vous devez absolument une visite au ‘‘Royal Naval Museum’’. Il y a là le résultat de plus de vingt ans de fouille sous-marine qui ont permit de mettre à jour les restes du Mary Rose, un bateau de guerre anglais coulé en 1545 avec tout son équipement. Ces fouilles ont mis à jour 138 longbows complets et plus de 3500 flèches. Cette visite fut une grande émotion pour moi, la vision des arcs réalisés il y a plus de quatre cents ans m’a ramené à l’humilité du copeau qui s’enroule sous la lame de mon rabot.

Un peu d’histoire : en 1509 et 1510 à Portsmouth, fut construit un bateau pour le roi Henri VIII. Ce bateau fut modifié et agrandi en 1536 pour obtenir une capacité de 700 tonneaux, ce qui était pour l’époque un des plus grands bateaux en service. En 1545 le Mary Rose est coulé par la flotte française à près de deux kilomètres de l’entrée du port de Portsmouth.

En 1965, des plongeurs retrouvent l’épave du Rose Mary par une dizaine de mètres de fond. En 1967 le comité du Rose Mary fut créé pour coordonner les fouilles. Pendant quinze années 16000 objets furent récupérés. Le 11 octobre 1982 le Mary Rose est renfloué. Les restes de l’épave sont de nos jours exposés au ‘‘Royal Naval Museum’’ de Portsmouth. Une grande quantité d’objets retrouvés fait l’objet d’une exposition permanente dans un des bâtiments du musée. Tout particulièrement une vingtaine de longbows, quelques flèches et les accessoires de l’archer.

 

Vue partielle d’une peinture de W. H. Bishop représentant d’après le résultat des fouilles une idée du Mary Rose.

J’avais déjà lu dans la dernière édition du livre de Robert Hardy ‘‘Longbow’’ (uniquement disponible en anglais) que les arcs du Mary Rose étaient de grandes puissances, les estimations des experts parlent de 90 livres pour les faibles et plus de 180 livres pour les plus puissants à des allonges de 30 pouces. Ces chiffres étaient difficiles à croire ; qui pourrait bander un arc de 180 livres ? Ayant un peu d’expérience de par mes fabrications personnelles, et après avoir vu dans le musée les arcs exposés, je crois maintenant que ces évaluations sont réalistes. Ce sont définitivement des arcs puissants. Certains ont dit : ce ne sont que des ébauches d’arcs. Cette affirmation était fondée sur le fait que la plupart des arcs ont été retrouvés dans des caisses, ce qui laissait supposer qu’ils n’étaient pas forcément prêts à être utilisés. Mais cette thèse fut abandonnée lorsque les fouilles ont permis de retrouver des arcs isolés aux postes de combats près des canonniers, et près des couchettes des soldats.

Les 138 arcs retrouvés sont tous en if, et visiblement les facteurs d’arcs anglais de cette époque, connaissaient bien leur travail et le bois. Le bois d’if utilisé est de première qualité, exactement la qualité dont je rêve d’avoir quelques bûches dans mon atelier. Dans le livre de Robert Hardy, il y a la photo d’une coupe d’un arc laissant compter une bonne soixantaine de cernes donc un grain d’une grande finesse. Je me suis rendu compte aussi en voyant les arcs présentés au musée qu’ils suivent le fil du bois en conservant sur leur dos une couche bien régulière d’aubier. Ces arcs sont bien finis et montrent un léger suivi de corde, je veux dire qu’ils avaient certainement fait l’objet d’un tillering. Les bûches d’if étaient finement sélectionnées et possédaient très peu de nœuds.

Les chercheurs n’ont retrouvé aucune trace de garnitures de poignée ou de poupées en corne. Les études approfondies ont révélé sur la plupart des arcs la présence d’un petit creux qui semble être un repère de flèches, afin que l’archer puisse toujours placer ses flèches au même endroit. Le bois des poupées, pour la quasi-totalité des arcs est d’une couleur plus claire sur les deux derniers pouces. Cette marque fut probablement laissée par les cornes qui devaient les habiller. Dans cette partie, une encoche latérale peu profonde servait durant la fabrication de l’arc à accrocher la corde, afin de réaliser le tillering avant de monter les poupées définitives en corne. Cette technique est encore utilisée aujourd’hui par un bon nombre de facteurs d’arc simple.

La longueur des plus petits arcs retrouvés sur le Mary Rose est d’environ 6 pieds (1 pied est égal à 12 pouces) et pour les plus grands de 6 pieds et 11 pouces. Quand je les ai vus j’ai d’abord pensé qu’ils étaient beaucoup moins longs, cette première impression est certainement due à leur grosseur. Ils ont une section en D bien sûr, mais leur dos n’est pas aussi plat qu’un cerne de bois, je veux dire que les deux arrêtes ont été arrondies tout le long de l’arc. Les arcs que j’ai vus mesurent à la poignée près d’un pouce et demi de large par une épaisseur légèrement supérieure. Ils sont fuselés régulièrement de la poignée aux poupées. Ces poupées doivent mesurer environ un demi pouce par un demi pouce. Même la plus grosse de mes ébauches n’a jamais été aussi imposante. Un seul qualificatif convient : massif. Mais qui étaient ces hommes capables de tirer des arcs de plus de 150 livres ? Une question sans réponse de nos jours, mais de toute façon ce devait être des archers surentraînés ou des monstres de muscles.

 

Poupée d’un Longbow du Mary Rose montrant clairement les différences de couleur ainsi que l’encoche permettant de retenir la corde lors de la fabrication. (Imperial College of Science and Technology de Londre)

Les Historiens nous donnent les éléments de réponse qui suivent. En 1335, Edouard III, alors roi d’Angleterre, qui avait déjà pris beaucoup de mesures contraignantes pour imposer la pratique du tir à l’arc à des fins militaires dans tout le royaume, décréta l’interdiction, sous peine de mort, de se divertir à un autre jeu que celui de l’arc. De plus il promit des remises de dettes à tous les ouvriers qui fabriquaient des arcs et des flèches. Avec une motivation pareille, il est plus facile de comprendre que cent ans après, l’Angleterre possède des archers redoutables et des facteurs d’arc expérimentés.

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Une caisse de longbows sortie intacte de l’eau, un long procédé commence pour la conservation, dessalage, lavage, séchage et traitement. Photo ‘‘The Mary Rose Trust’’

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Passons aux plus de 35000 flèches retrouvées. Elles sont en peuplier majoritairement mais il y en a aussi en hêtre, frêne et noisetier. Elles ont une longueur de 24 à 32 pouces. La plupart mesure 30 pouces. Celles que j’ai vues sont coniques, le plus grand diamètre côté pointe. Les petits fragments de plume retrouvés laissent à penser quelles étaient en cygne ou oie. Les encoches étaient taillées dans le fût et renforcées par une insertion à 90° d’une petite plaque de corne. Peu d’informations sur les pointes métalliques qui ont fondu dans l’eau de mer. Un certain nombre a été retrouvé par paquet de 24 dans des restants de carquois. Il reste de ces carquois seulement des entretoises en cuir dont le rôle évident était de séparer les flèches afin de protéger les plumes.

 

Photo d’une des vitrines du musée où l’on voit les entretoises des carquois et des protections de bras.

 

 

GLOSSAIRE

Allonge : Distance spécifique à chaque archer qui se mesure du dos de l’arc à la hauteur du passage de flèche au point d’ancrage sur le visage de l’archer.

Arille : Excroissance charnue de certaines graines.

Armer l’arc : Amener la corde de l’arc au point d’ancrage au visage.

Aubier : Ensemble des cernes sous l’écorce des arbres composant le bois jeune. Généralement plus clair que la partie centrale de l’arbre.

Band de l’arc : Est la distance qui sépare la corde du fond de la poignée côté ventre (corde montée). Voir aussi chapitre ‘’L’équilibrage des branches’’ pour les méthodes anglaise et américaine.

Backing : Opération consistant à ajouter un revêtement sur le dos de l’arc pour en modifier les caractéristiques. Voir chapitre Backing.

Bander un arc :Veut dire mettre la corde dans les coches des poupées.

Bille de bois : Longueur coupée de tronc d’arbre sans branches et dépourvue de gros défauts.

Branches : Parties flexibles de l’arc de chaque côté de la poignée.

Cerne : Couche circulaire annuelle du bois visible sur la tranche d’une bûche. Le nombre de cernes définit l’âge de l’arbre.

Coche : Petite entaille sur les poupées retenant la corde.

Conifère : Arbres dont les fruits ont une forme de cône.

Compound : Mot anglais devenu l’appellation standard des arcs à poulies.

Cresting : Action de personnaliser ses flèches à ses couleurs.

Décoche : Action de libérer la corde afin de lancer la flèche.

Dos de l’arc : Surface de l’arc faisant face à la cible en position de tir.

Duramen : Partie centrale sous l’aubier composée de bois dur souvent appelée cœur du bois.

Empennes : Nom donné aux plumes que l’on colle sur les flèches pour en réaliser l’empennage.

Empenneuse : Appareil servant à maintenir une ou plusieurs plumes sur le fût de la flèche afin de la ou les coller en position correcte.

Encoche : Extrémité de la flèche ‘’maintenant en plastique’’ venant maintenir la flèche sur la corde.

Fenêtre de l’arc : Partie évidée de la poignée des arcs modernes laissant passer la flèche au centre de l’arc.

Flatbow : Arc se caractérisant par des branches beaucoup plus larges qu’épaisses.

Foot : En français ‘’pied’’, unité de mesure anglo-saxonne égale à 12 pouces.

Force de l’arc : Force en livres (1 livre est égale à 454 grammes) nécessaire à amener la corde à une allonge généralement égale à 28 pouces.

Grain : Unité de poids anglo-saxonne égale à 0.065 grammes.

Inch : En français ‘’pouce’’, unité de mesure anglo-saxonne égale à 2,54 centimètres.

Livre : En anglais ‘’pound’’, unité de poids anglo-saxonne égale à 454 grammes.

Longbow : Arc long et droit (environ 70 pouces).

Longueur de l’arc : Distance prise sur le dos de l’arc entre les coches de chaque poupée. Cette distance est en pouces (1 pouce est égal à 2,54 centimètres).

Main d’arc : C’est la main qui tient la poignée de l’arc. Main droite pour les gauchers et main gauche pour les droitiers

Peson : Dynamomètre à ressort permettant de mesurer la force d’un arc.

Pied : En anglais ‘’foot’’, unité de mesure anglo-saxonne égale à 12 pouces.

Plane : Outil à lame plate ou convexe muni de deux manches pour dégrossir le bois.

Point d’ancrage : Position de la main sur le visage de l’archer, arc armé.

Poignée : Partie centrale de l’arc servant à tenir l’arc. Dans la main gauche des droitiers et droite pour les gauchers.

Pointe : Extrémité de la flèche le plus souvent métallique.

Pound : En français ‘’livre’’, unité de poids anglo-saxonne égale à 454 grammes.

Poupée : Extrémité des branches de l’arc où vient se fixer la corde.

Pouce : En anglais ‘’inch’’, unité de mesure anglo-saxonne égale à 2,54 centimètres.

Recurve : Appellation anglaise des arcs à double courbure ou en français arcs recourbés. C’est la forme des arcs de tir à la cible et des arcs d’initiation.

Selfbow : Arc réalisé uniquement en bois, soit en une pièce soit en deux raccordées à la poignée.

Spine : Mot anglais définissant la flexibilité d’une flèche en fonction de la force de l’arc en livres.

Suivi de corde : En anglais ‘’string follow’’ mesure de la déformation d’un arc après démontage de la corde.

Tillering : Mot anglais définissant l’action de régler la force relative des branches d’un arc.

Ventre de l’arc : Surface de l’arc faisant face à l’archer en position de tir.


 

    
Les matières premières

CONSTRUIRE UN ARC, MAIS C’EST TRES SIMPLE.

Les matières premières pour la fabrication d’un arc:

Les bois:

Pour fabriquer un arc nous avons le choix de différentes essences de bois, à savoir :

l’if (le ROI) 
l’érable dur 
le frêne 
l’hickory 
le bambou 
l’osage 
etc. 
mais il n’est pas facile de se procurer ces différentes essences, notamment l’if, et surtout dans des dimensions qui nous intéressent. 
Pour notre part, nous vous conseillons d’utiliser le Bubinga ou l’Erable dur pour votre premier arc, ils donnent d’excellents résultats.

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